(Moscou) La Cour suprême russe a révoqué jeudi l’autorisation de diffusion du site internet du média Novaïa Gazeta, a annoncé ce dernier, un nouveau coup contre ce bastion du journalisme d’investigation qui a critiqué l’intervention en Ukraine.

Sur son compte Telegram, Novaïa Gazeta a indiqué que la Cour suprême avait donné raison à une plainte du gendarme des médias russes, Roskomnadzor. Le site du journal permet d’accéder librement aux archives et aux enquêtes publiées par Novaïa Gazeta.

Le journal a indiqué qu’il allait faire appel. En cas de confirmation de cette décision, il ne précise pas si cette mesure signifiera une fermeture du site internet, ou seulement une interdiction d’y publier de nouveaux contenus journalistiques.

Cette décision fait partie de trois plaintes déposées fin juillet par Roskomnadzor et approuvées coup sur coup par la justice russe.

Début septembre, un tribunal de Moscou a ainsi révoqué la licence de la version papier du journal, puis celle d’une nouvelle revue lancée en Russie par Novaïa Gazeta.

Dans les faits, le journal ne paraît plus depuis fin mars dans le pays, quand il avait décidé de suspendre sa publication par crainte de représailles, en pleine répression des critiques de l’attaque en Ukraine.

Mais, ces dernières semaines, le site du média a repris la publication de contenus. Début août, la rédaction de Novaïa Gazeta a également lancé un nouveau site, Novaya.media, qui permet de lire anonymement ses contenus en Russie.

Le rédacteur en chef du journal, Dmitri Mouratov, a été co-lauréat en 2021 du Prix Nobel de la Paix.  

Lors de l’audience à la Cour suprême, M. Mouratov a dénoncé « le meurtre » de son journal, d’après ses propos cités par Novaïa Gazeta. Selon lui, cette mesure va priver les lecteurs russes du « droit à l’information ».

Selon Novaïa Gazeta, la Cour suprême a ordonné la révocation de la licence de son site internet au motif qu’il avait mentionné des organisations déclarées « agents de l’étranger » sans mentionner explicitement qu’elles avaient ce statut.

En Russie, des dizaines d’organisations et d’individus ont été déclarés « agents de l’étranger » et leur statut doit être systématiquement mentionné dans toute publication, sous peine de sanctions.

La pression contre les médias indépendants allait déjà crescendo, mais l’offensive du Kremlin en Ukraine depuis février a marqué une accélération brutale. Des dizaines de sites internet de médias ont été bloqués et des journalistes ont fui en masse le pays.

Le 5 septembre, l’ex-journaliste russe Ivan Safronov, spécialiste reconnu des questions de défense, a été condamné à 22 ans de prison pour « trahison » dans une affaire qu’il estime être une vengeance pour son travail.