Les candidats qui ont remis en question la victoire de Joe Biden à la présidentielle de 2020 formaient un peu plus de la moitié des républicains sur les bulletins de vote des élections de mi-mandat. Si bon nombre d’entre eux ont été élus, d’autres ont perdu des batailles clés.

« Aucun des candidats aux postes clés pour l’administration d’élections justes dans les États pivots n’a gagné et, en fait, ils ont obtenu moins de voix que les autres républicains dans ces États, analyse au téléphone Rick Pildes, professeur de droit constitutionnel à la New York University School of Law. Donc, ça semble assez clair qu’il y a eu une réaction très substantielle du public contre ces candidats, parce qu’ils ont nié la légitimité des élections, semble-t-il. »

Même si des enquêtes ont démenti les accusations de fraudes massives ou d’élections « volées » en 2020, 291 personnes qui ont nié la victoire de Joe Biden il y a deux ans ont porté la bannière du Parti républicain aux élections de mi-mandat le 8 novembre, selon une compilation du Washington Post. Ils représentaient donc 51 % des candidats choisis par la formation politique, tous postes confondus, pour défendre ses couleurs.

Rôles cruciaux

« Nous avons le système d’élections primaires pour déterminer le candidat d’un parti et ces primaires ont tendance à être dominées par la frange la plus idéologique des partis, rappelle M. Pildes. Donc, il n’y a aucun doute qu’une partie significative d’une faction du Parti républicain soutient les vues [sur des fraudes électorales massives] et qu’ils étaient en nombre suffisant pour permettre aux candidats de leur faction de se présenter. Mais ça n’a pas eu une résonance assez large au sein de la population générale. »

Plus particulièrement aux postes clés de gouverneur ou de secrétaire d’État dans des États pivots comme l’Arizona, le Nevada et le Michigan, par exemple. Après une lutte serrée, la défaite de Kari Lake, l’une des candidates qui a clamé avec force le « vol » des élections de 2020, a été confirmée lundi. L’ancienne présentatrice de télévision convoitait le poste de gouverneur de l’Arizona.

Le rôle crucial des secrétaires d’État a été mis en lumière lors des dernières contestations électorales. Dans la majorité des États, ce sont eux, les responsables du scrutin qui certifient le résultat.

Or, des candidats républicains aux dernières élections de mi-mandat avaient déjà indiqué qu’ils n’auraient pas attesté la victoire de Joe Biden s’ils avaient été en poste en 2020.

C’était le cas du candidat défait au poste de secrétaire d’État de l’Arizona, Mark Finchem, et de celui du Nevada, Jim Merchant, un partisan de Donald Trump, qui a lui aussi perdu.

« C’est très atypique ; les secrétaires d’État sont censés être des arbitres neutres et être neutres dans l’administration des élections de leur État, explique Charlotte Hill, directrice de la Democracy Policy Initiative à la Berkeley’s Goldman School of Public Policy, en Californie. Qu’un candidat au poste de secrétaire d’État dise “je sais qui va gagner” et laisse pratiquement entendre qu’il s’assurera de la victoire d’un candidat est très atypique. »

Menace à la démocratie

Si elle voit comme « une bonne nouvelle pour la démocratie américaine » la défaite des candidats bien en vue adhérant à des théories démontées par les faits – et qui auraient pu faire obstacle au prochain vote –, Mme Hill reste inquiète de la « menace sur le système démocratique ».

En date de jeudi, 176 des 291 candidats ayant nié la victoire de Joe Biden avaient tout de même été élus, dans différents postes, notamment au niveau local.

Les résultats des élections du 8 novembre n’étaient pas connus pour huit courses.

Le Parti républicain a aussi remporté la majorité des sièges à la Chambre des représentants, avec son lot de candidats ayant remis en question la légitimité du vote de 2020.

« C’est clair que dans les districts plus sûrs pour les républicains, ceux qui ont nié le résultat des élections peuvent encore gagner et sont favorisés par la base, dit Mme Hill. Ce sera un point de tension au Parti républicain en vue des élections de 2024, de voir comment résonner avec une base qui croit largement des mensonges et qui pense que les républicains devraient tout faire pour garder le pouvoir, tout en n’utilisant pas trop un langage antidémocratique qui leur ferait perdre des électeurs modérés dans les États pivots. »

Avec le Washington Post