(Washington) Si l’ancien vice-président Joe Biden remporte l’élection présidentielle en novembre, on assisterait vraisemblablement à une volte-face de l’actuelle politique étrangère américaine.

Si M. Biden occupe la Maison-Blanche, les observateurs s’attendent à ce qu’il renverse ou démantèle nombre des mesures les plus importantes et les plus téméraires du président Donald Trump.

Le candidat démocrate et son équipe se sont déjà engagés à déclencher un tsunami de changements sur des sujets aussi variés que le terrorisme, le contrôle des armements, l’immigration, le Moyen-Orient ou même, l’Europe.

À quelques exceptions près, Biden réconciliera sans doute le pays avec ses alliés traditionnels. Là où Donald Trump maniait les menaces et les insultes pour faire avancer ses causes, son adversaire sera plus enclin à rechercher un terrain d’entente.

Sur le plan historique, la politique étrangère américaine n’a pas subi des transformations profondes, même lorsque les démocrates et les républicains se succédaient à la Maison-Blanche. Les méchants étaient les mêmes, les amis étaient les mêmes. Le corps diplomatique non partisan défendait les intérêts du pays.

Et puis vint Donald Trump.

L’actuel président a toujours considéré les alliés traditionnels et le secrétariat d’État avec suspicion. Il a parlé chaleureusement des adversaires des États-Unis, comme le Nord-Coréen Kim Jong-un ou le Russe Vladimir Poutine.

Toutefois, M. Trump a eu du mal à imposer des changements rapides. Selon les spécialistes, la politique étrangère américaine est comme un porte-avions. S’il est aisé de commander un changement de cap, il est très difficile et très long d’y parvenir.

Le président a pu le constater lorsqu’il a été incapable de sortir les États-Unis de l’accord nucléaire iranien pendant plus d’un an. Même ses retraits très médiatisés de l’Accord de Paris sur les changements climatiques ou de l’Organisation mondiale de la santé n’entreront en vigueur qu’après le 3 novembre. Le redéploiement des troupes actuellement en Allemagne pourrait s’étendre sur des années.

Les problèmes initiaux de Donald Trump et de son équipe ont reflété leur manque d’expérience. L’apprentissage, déjà difficile en soi, a été compliquée à cause de leur méfiance intense les institutions de sécurité nationale.

M. Biden, par son expérience au Sénat et à la Maison-Blanche, est peut-être mieux placé pour apporter des changements rapides.

Il a déclaré mardi à des journalistes qu’il savait « comment faire avancer les choses à l’échelle internationale ».

« Je comprends les problèmes de sécurité nationale et de renseignement, a-t-il déclaré. C’est ce que j’ai fait toute ma vie. Trump, lui n’en a aucune idée. Aucune. »

L’organisation de Joe Biden a également réuni une équipe expérimentée pour le conseiller en politique étrangère. Jake Sullivan a été un adjoint du président Barack Obama et directeur de la planification politique au département d’État. Nicholas Burns a occupé des postes de haute responsabilité en politique étrangère sous les présidents George W. Bush et Bill Clinton. Tony Blinken était secrétaire d’État adjoint et conseiller adjoint à la sécurité nationale de M. Obama.

Susan Rice, qui a été ambassadrice à l’ONU pendant la présidence de Barack Obama, est l’une des favorites pour la vice-présidence. Elle pourrait devenir une conseillère fort écoutée en cas de victoire démocrate.

Pour l’équipe de Donald Trump, l’expérience en politique étrangère de Joe Biden est en réalité une faiblesse.

« Le bilan d’apaisement et l’appui à la mondialisation de Joe Biden seraient préjudiciables à la politique étrangère et à la sécurité nationale américaines. Après des décennies de statu quo, le président Trump a clairement indiqué que les États-Unis ne seront plus exploités par le reste du monde », a vaticiné le secrétaire adjoint de presse Ken Farnaso dans un communiqué.

Joe Biden a promis d'annuler d’autres politiques trumpiennes dès les premiers jours de son mandat. Parmi celles-ci : l’interdiction d’immigrer aux États-Unis pour les citoyens de certains pays musulmans, le retrait de l’Organisation mondiale de la santé, l’opposition à l’accord de Paris. Il s’est aussi engagé à appeler les principaux dirigeants de l’OTAN pour leur signifier que les États-Unis « seront de retour. »

Les relations avec la Chine exigeront plus de nuances. M. Trump, qui a placé la Chine en tête de liste des adversaires des États-Unis après avoir louangé son homologue Xi Jinping, accuse le démocrate de faire preuve de faiblesse à ce chapitre.

Joe Biden a été plus lent à critiquer directement les mesures récentes du président contre la Chine. Son équipe demande si M. Trump finira par saper les propres positions de son gouvernement en adoptant un ton personnel plus doux envers Pékin.

« Le gouvernement a l’habitude de parler très fort, mais sans produire de résultats », fustige Jeff Prescott, un conseiller en politique étrangère de M. Biden.