En 2016, Donald Trump a remporté la Maison-Blanche en ayant obtenu près de 3 millions de votes de moins qu’Hillary Clinton. Il ne s’agissait pas d’un coup de chance : cet avantage extraordinaire en faveur des républicains pourrait faire pencher la balance à nouveau en 2020 et au-delà, selon une nouvelle étude de l’Université du Texas. Explications.

Inversions possibles

Quand Donald Trump a remporté la Maison-Blanche tout en ayant perdu le vote populaire en 2016, beaucoup d’observateurs ont cru à un coup de chance en faveur du républicain. Or, ce scénario était loin d’être dû au hasard : c’est que le système du collège électoral, qui favorise les petits États au détriment des plus populeux, offre un avantage marqué au Parti républicain en cas de vote serré, rapporte la première étude de probabilités jamais menée sur le sujet. « Bien des gens savaient que le collègue électoral avantageait les républicains », explique en entrevue Mike Geruso, professeur associé en économie à l’Université du Texas à Austin, et coauteur de l’étude. « Mais notre étude est la première à quantifier l’ampleur de ce phénomène. Nous avons été surpris. »

PHOTO KIM HONG-JI, ARCHIVES REUTERS

Le système du collège électoral attribue un certain nombre de grands électeurs à chaque État. Le candidat ayant remporté le plus grand nombre de votes dans un État donné rafle la totalité des grands électeurs de cet État – système qui désavantage les États très populeux. Ici, carte de la présidentielle de 2016.

Vote serré

Le système du collège électoral attribue un certain nombre de grands électeurs à chaque État. Le candidat ayant remporté le plus grand nombre de votes dans un État donné rafle la totalité des grands électeurs de cet État. Ce système désavantage les États très populeux, comme la Californie, où, par exemple, les millions de votes en plus recueillis par le candidat démocrate ne lui accordent pas plus de grands électeurs que si ce candidat avait gagné par une majorité d’une seule voix. Résultat : un candidat présidentiel républicain a 65 % de chances de remporter la Maison-Blanche s’il perd de peu le vote populaire sur le plan national — ce que les chercheurs appellent une inversion. « Nous avons aussi réalisé combien les inversions étaient courantes, dit M. Geruso. Cela fait 200 ans que des inversions se produisent. Les inversions vécues lors des élections de 2000 et de 2016 ne sont pas survenues parce que ces scrutins étaient inhabituels. Elles sont survenues parce que le vote était serré. »

Compromis

Le système du collège électoral créé par les pères fondateurs des États-Unis était à l’origine un compromis : c’est qu’une partie de ce groupe voulait que ce soit les élus au Congrès qui choisissent le président, tandis qu’une autre partie voulait donner ce pouvoir aux électeurs. Aujourd’hui, défaire ce compromis demanderait un amendement constitutionnel, qui serait pratiquement impossible à obtenir en raison de la partisanerie au Congrès. En effet, pour que cela arrive, il faudrait l’appui des deux tiers des membres de la Chambre des représentants, des deux tiers des élus du Sénat et des trois quarts des États.

Possibilité

Cela ne veut pas dire qu’aucun changement n’est possible : lancé en 2006, le pacte national de vote populaire inter-États vise à convaincre les États américains de faire élire le candidat qui a reçu le plus grand nombre de votes — pas celui qui a obtenu le plus d’électeurs au collège électoral. « Le pacte national de vote populaire inter-États pourrait confier la présidence au vainqueur du vote populaire sans démanteler le collège électoral, avance Mike Geruso. À ce jour, elle a été adoptée par 16 États, couvrant 196 des 270 votes électoraux nécessaires à son activation. »