Barack Obama a quitté l'Inde, hier, au terme d'un voyage de trois jours où le premier ministre Narendra Modi et lui ont semblé s'entendre comme larrons en foire. Retour en cinq temps sur un voyage jugé réussi qui pourrait faire passer les relations entre Washington et New Delhi à un autre niveau.

Camaraderie

C'est sans doute l'aspect le plus frappant de la visite d'Obama en Inde. Oubliant le protocole, le premier ministre Narendra Modi a foncé vers le président américain dès sa descente d'avion pour lui servir une accolade virile. Il a ensuite parlé de la «chimie» et de la «forte amitié» qui l'unit à «Barack». «Au cours des derniers jours, on a vu deux pays qui s'entendent et veulent faire passer leur relation à un autre niveau, mais aussi deux chefs d'État qui font la même chose», dit Michael Kugelman, expert de l'Inde au Wilson Center à Washington. Modi, un hindou nationaliste, a longtemps été privé de visa américain pour avoir fermé les yeux sur la violence faite aux musulmans quand il était gouverneur du Gujarat. Même si le premier ministre a tout à gagner à se montrer en bons termes avec Obama, Michael Kugelman juge «sincère» la camaraderie entre les deux hommes. Obama a tout de même parlé hier des droits des minorités religieuses en Inde lors d'un discours.

Nucléaire

L'entente sur le nucléaire est le principal résultat concret de la visite d'Obama à New Delhi. En 2006, les deux pays avaient signé un accord qui permettait aux Américains de vendre leur technologie nucléaire civile à l'Inde. Le hic: ils ne s'étaient pas entendus sur qui paierait les pots cassés en cas d'accident nucléaire, ce qui a rendu l'entente caduque. Washington et New Delhi ont abattu ce dernier obstacle cette semaine en créant un regroupement d'assureurs privés qui assumera les risques financiers. «À l'époque, cette entente était vue comme le symbole de la relation entre les deux pays, et le fait qu'elle n'ait jamais été implantée montrait que des problèmes subsistaient. D'un point de vue symbolique et stratégique, la résolution de cette dispute est importante», dit Michael Kugelman.

Coopération en mer de Chine

La Chine se fait de plus en plus agressive dans ses revendications territoriales en mer de Chine, et Washington et New Delhi ont convenu d'unir leurs efforts pour s'y opposer. «Les États-Unis sont favorables à un rôle accru de l'Inde en Asie-Pacifique, où la liberté de navigation doit être maintenue et où les différends doivent être réglés pacifiquement», a dit Barack Obama.

Économie

Les États-Unis et l'Inde échangent 100 milliards de dollars US de marchandises annuellement - une somme qui semble élevée, mais qui est près de six fois moindre que les échanges commerciaux entre Washington et Pékin. Barack Obama et Narendra Modi ont dit vouloir augmenter ces échanges et ont signé quelques ententes en ce sens. «On voit ici des intentions, sauf qu'il existe plusieurs contraintes qui rendent les échanges commerciaux difficiles et qui n'ont pas vraiment été abordées au cours du voyage», commente l'expert Michael Kugelman, qui souligne notamment le protectionnisme dont fait preuve New Delhi envers plusieurs de ses industries.

Changements climatiques

«Même si des pays comme les États-Unis réduisaient leurs émissions, si les pays en croissance comme l'Inde - avec ses besoins énergétiques en forte croissance - ne se tournent pas vers des énergies propres, nous n'avons aucune chance contre les changements climatiques.» Barack Obama ne pouvait être plus clair, hier, dans son message livré à New Delhi. Le gouvernement indien entend presque doubler sa production de charbon d'ici 2019, ce qui aurait des conséquences catastrophiques sur le climat. Selon Michael Kugelman, il ne faut cependant pas s'attendre à voir plier New Delhi sur cette question. «L'Inde soutient qu'elle doit se concentrer sur la croissance et le développement avant de diminuer ses émissions. Des mots ont été prononcés, mais soyons clairs: l'Inde ne signera pas une entente avec Washington sur la réduction de ses émissions comme l'a fait la Chine cet automne», dit-il.