L'administration Obama a rendu un détenu de Guantánamo au Koweït mercredi à l'aube, et se prépare à en libérer une quinzaine d'autres cet hiver après des mois de blocage, dans le but ultime de fermer cette prison très critiquée.

L'avion du gouvernement koweïtien a décollé à 5 h 30 locales, quand le soleil se levait sur la base navale américaine située sur l'île de Cuba.

À son bord, l'un des deux derniers Koweïtiens de Guantánamo, Fawzi al-Odah, 37 ans, qui devait rejoindre un centre de réinsertion spécialement conçu par le gouvernement koweïtien pour accueillir les anciens détenus de la prison américaine. Dix Koweïtiens y sont déjà passés.

Ce transfèrement, le premier d'un détenu de Guantánamo en cinq mois, réduit à 148 le nombre d'hommes encore enfermés dans les geôles de la prison érigée dans une enclave louée à Cuba, a annoncé sur place un porte-parole du Pentagone.

À l'instar de 79 autres prisonniers de Guantánamo libérables, Fawzi al-Odah n'a été ni inculpé, ni jugé et son départ avait été approuvé par l'administration Obama le 25 juillet dernier, a précisé le lieutenant-colonel Myles Caggins, sur la base navale américaine.

Après son arrestation le 18 novembre 2001 à la frontière pakistano-afghane, Al-Odah était arrivé à Guantanamo parmi les premiers hommes vêtus de combinaisons orange et enfermés dans des cages à ciel ouvert. Il était soupçonné de liens étroits avec Al-Qaïda, en particulier avec Oussama ben Laden.

Mais le Comité de révision des situations (Periodic Review Board, PRB), créé par Barack Obama en 2011 dans le cadre de ses efforts pour fermer la prison, avait revu son dossier le 14 juillet.

En donnant son feu vert à sa libération, il avait admis le manque de crédibilité des témoignages concernant le Koweïtien, et reconnu «l'engagement personnel du détenu à participer au programme de réinsertion du gouvernement du Koweït» ainsi que «son important soutien familial».

Son rapatriement, près de 13 ans après son incarcération, intervient au lendemain d'une cuisante défaite électorale pour Barack Obama, qui accuse le Congrès de l'empêcher de fermer la prison, comme il le promet inlassablement.

Il survient également après des mois de blocage, depuis la libération controversée fin mai de cinq talibans en échange du sergent américain Bowe Bergdahl, au grand dam des élus républicains qui n'en avaient pas été informés au préalable et avaient protesté avec virulence.

Mais l'administration Obama a réitéré mercredi son intention d'accélérer les transfèrements, en accord avec la loi, dans le but ultime de fermer la prison.

«Le ministère de la Défense espère transférer une quinzaine de détenus dans des pays d'Amérique du Sud et d'Europe dans les deux mois, ou au cours de l'hiver», a déclaré à l'AFP un responsable militaire, sous couvert d'anonymat.

Ce responsable a précisé qu'un pays d'accueil avait été trouvé - mais non finalisé - pour une petite vingtaine d'hommes de Guantánamo.

La libération de six d'entre eux à destination de l'Uruguay a été bloquée pour des raisons politiques et la situation instable du Yémen rend pour l'heure tout transfert difficile dans ce pays.

Il reste 79 détenus de Guantánamo, dont une majorité de Yéménites, qui ont reçu «une approbation pour transfert». Cela signifie qu'ils sont théoriquement libérables dès que l'administration trouvera un endroit pour les transférer.

«Le ministère de la Défense oeuvre assidûment pour transférer les détenus qui restent à Guantánamo», a précisé à l'AFP le lieutenant-colonel Caggins. Mais il le fera «en accord avec les exigences de la loi» en notifiant dûment le Congrès avant tout transfert, a-t-il précisé, soulignant que «la fermeture de Guantánamo est une priorité du Pentagone».

Le président Barack Obama a été soupçonné récemment dans des médias de vouloir court-circuiter le Congrès, dont la majorité politique lui est défavorable.

«Le président a toujours la possibilité de fermer Guantánamo. Un Congrès encore moins favorable pourrait finalement l'aider à user de ce pouvoir», a estimé Andrea Prasow, experte de Guantánamo à Human Rights Watch, au lendemain de l'élection. «À moins de deux ans de la fin de son mandat, Obama sait qu'il est temps de passer vraiment à l'action».