L'avion du dissident chinois aveugle Chen Guangcheng est arrivé samedi soir à New York en provenance de Pékin, épilogue d'un mois d'incertitudes et de casse-tête diplomatique entre la Chine et les États-Unis.

Chen, 40 ans, est arrivé avec sa femme et leurs deux enfants à bord d'un vol United Airlines qui a atterri peu avant 18H30 locales à l'aéroport de Newark, qui dessert New York, selon le site d'United.

La famille devait ensuite rejoindre le sud de Manhattan, pour y passer sa première nuit dans un appartement du Washington Square Village, a indiqué l'université de New York (NYU) où le dissident doit étudier. L'immeuble où il passera la nuit est entouré de jardins avec des jeux d'enfants.

Dans l'après-midi, la Maison-Blanche avait salué son départ de Chine, dont les détails avaient été tenus secrets jusqu'au dernier moment.

«Nous prenons note du fait que M. Chen, sa femme et ses deux enfants, sont en train de voyager vers les États-Unis. Nous saluons cette évolution et le fait qu'il pourra étudier ici», a déclaré la Maison-Blanche, en marge du sommet de Camp David.

Bob Fu, président de l'Association chrétienne américaine ChinaAid, a précisé à l'AFP que Chen, auquel il a parlé avant son départ de Pékin, n'avait su qu'à la dernière minute qu'il devait partir, et qu'il avait reçu ses passeports à l'aéroport.

«C'est arrivé très vite. Personne ne lui avait rien dit avant ce matin. À 10H00 (heure de Pékin), on lui a dit de faire ses bagages et peu après une voiture du gouvernement l'a emmené à l'aéroport».

Selon Bob Fu, il était «très enthousiaste», mais aussi «très inquiet» pour les membres de sa famille restés en Chine.

Une fois arrivé aux États-Unis, «il va se reposer et étudier», a ajouté Bob Fu.

Chen Guangcheng, qui ne parle guère l'anglais, est un avocat autodidacte connu pour avoir dénoncé les avortements et campagnes de stérilisation forcés, ainsi que les expropriations abusives. Il avait été emprisonné en 2006, puis de facto assigné à résidence en 2010.

Son départ met un terme à un mois d'incertitudes et de tensions diplomatiques, depuis son évasion le 22 avril du village de Dongshigu (est de la Chine) où il était assigné à résidence.

Il s'était ensuite réfugié à l'ambassade des États-Unis à Pékin, quelques jours avant l'arrivée de la secrétaire d'État Hillary Clinton pour le «dialogue stratégique et économique» annuel entre Pékin et Washington.

Après six jours, il avait accepté de quitter l'ambassade pour être hospitalisé pour un pied cassé durant son évasion, mais avait rapidement regretté d'avoir fait confiance aux autorités chinoises et s'était finalement dit désireux de quitter la Chine.

Un accord avait été annoncé le 5 mai entre Pékin et Washington pour son départ. Il a ensuite reçu une offre de bourse de l'université de New York (NYU).

Mais il pourrait aussi recevoir d'autres propositions, notamment d'un groupe de Dallas (Texas), a déclaré à l'AFP Reggie Littlejohn, présidente de l'association «Womens's right without frontiers», venue l'accueillir à l'aéroport avec une militante, Xuezhen Wang, portant un énorme ours en peluche.

«Je suis très heureux d'apprendre que Chen Guangcheng est en route pour les États-Unis. J'attends avec impatience de l'accueillir avec sa famille ce soir et de travailler avec lui sur ses études», a indiqué le sinologue Jerome Cohen, co-directeur de l'institut de droit Asie-USA à NYU.

Le dissident reconnaissant

Chen Guangcheng a exprimé sa «gratitude» envers les États-unis tout en saluant «le calme et la retenue» du gouvernement chinois samedi soir, peu après son arrivée à New York.

Le pied droit plâtré, s'appuyant sur des béquilles, il a donné une brève conférence de presse en chinois, traduite simultanément en anglais, remerciant tous ceux qui l'avaient aidé dans «les nombreuses turbulences» qu'il a traversées.

Il a été chaleureusement applaudi par les personnes qui s'étaient rassemblées devant l'immeuble où il va résider avec sa femme et ses deux enfants, à Washington square village, dans le sud de Manhattan.

M. Chen a tenu aussi à saluer le «calme et la retenue» des responsables chinois et a exprimé l'espoir que leurs promesses soient «sincères». «J'espère qu'il ne me mentent pas», a-t-il ajouté.

Et il a appelé à «continuer le combat pour le bien dans le monde, et contre l'injustice».