«Merci d'avoir gâché nos vacances», a lancé Piper Palin, 10 ans, à l'un des photographes qui tentaient de s'approcher de sa mère à Philadelphie, où la plus célèbre des familles d'Alaska voulait voir la Liberty Bell, symbole de l'Indépendance américaine.

Le mystère de la tournée de Sarah Palin sur la côte Est, qui s'était mise en branle trois jours plus tôt à Washington, était enfin éclairci. Il ne s'agissait pas du début informel de la campagne présidentielle de l'ancienne colistière de John McCain, comme certains journalistes l'avaient laissé entendre, ou d'une virée autopromotionnelle organisée par une star médiatique soucieuse d'entretenir sa célébrité.

Sarah Palin et sa famille étaient en vacances.

Des vacances pas comme les autres, cela s'entend. Quelques jours avant le début de sa tournée, l'ex-gouverneure d'Alaska avait annoncé sur son site internet son intention de visiter les «lieux historiques» du nord-est des États-Unis afin de «promouvoir la restauration de l'Amérique». Rien de moins.

Et elle avait nolisé un autocar sur lequel on pouvait lire «One Nation» (un seul pays) et voir aussi une reproduction du texte de la Constitution américaine. «Nous, le peuple des États-Unis...»

Tout ce branle-bas a évidemment piqué l'intérêt des médias, qui n'ont voulu rater aucune étape de la tournée des Palin, à commencer par leur participation à un défilé de motards à Washington en hommage aux anciens combattants. Mardi dernier, lors de la halte à Philadelphie, une quinzaine de voitures et d'hélicoptères ont tenté de suivre les vacanciers d'Alaska, selon le décompte du Philadelphia Enquirer.

Il faut dire que Sarah Palin n'a pas facilité la vie des médias, refusant de les tenir au courant de son programme quotidien, ce dont les journalistes se sont plaints dans la moitié de leurs reportages sur sa tournée.

«Les médias peuvent trouver où nous allons en faisant leur travail d'investigation», a déclaré Sarah Palin à l'animatrice de Fox News Greta Van Susteren, qui a pu l'interviewer à bord de son autocar à la veille de la halte à New York, où l'égérie du Tea Party a pu visiter la statue de la Liberté et manger une pizza avec nul autre que le milliardaire Donald Trump.

Virtuose des médias

La rencontre des deux stars de téléréalité aux ambitions présidentielles plus ou moins sérieuses n'est évidemment pas passée inaperçue.

«Elle joue des médias comme du violon», a observé un commentateur du Los Angeles Times, dûment impressionné par la façon dont Sarah Palin peut à la fois démontrer son mépris à l'égard des journalistes et monopoliser leur attention.

Bien entendu, il se peut très bien que Sarah Palin n'ait pas dit toute la vérité à sa fille Piper. Plusieurs analystes ont d'ailleurs avancé que ses «vacances» correspondaient exactement à la façon non conformiste dont elle voudrait mener sa campagne à la présidence si elle décidait de déclarer sa candidature.

Une telle approche serait sûrement aux antipodes de la campagne que l'ancien gouverneur du Massachusetts Mitt Romney a lancée officiellement jeudi dernier au New Hampshire, État qui doit tenir les premières primaires de l'année électorale de 2012. Le favori de la course à l'investiture républicaine est du genre à suivre à la lettre les règles éprouvées de la politique.

Il a d'ailleurs dû être surpris et déçu de constater que Sarah Palin avait rompu avec la courtoisie habituelle en choisissant le jour même du lancement officiel de sa campagne présidentielle pour s'arrêter au New Hampshire, où elle a rencontré des électeurs et répondu aux questions des journalistes de CNN, NBC et du Washington Post, entre autres. Avant cette halte, qui mettait un terme à sa tournée de la côte Est, l'ex-candidate à la vice-présidence avait également critiqué la réforme du système de santé promulguée par Mitt Romney à l'époque où il était gouverneur du Massachusetts.

Le lendemain, le quotidien le plus important du New Hampshire a consacré sa grande manchette à la visite de Sarah Palin dans cet État de la Nouvelle-Angleterre et relégué aux pages intérieures son reportage sur le lancement de la campagne présidentielle de Mitt Romney.

L'ex-gouverneur du Massachusetts devrait peut-être songer à partir en «vacances» avec sa famille.