Les fuites de 250 000 notes diplomatiques américaines orchestrées par WikiLeaks provoquaient lundi la consternation dans les chancelleries du monde entier, tandis que la Maison-Blanche a réagi en qualifiant cette opération de «crime grave».

WikiLeaks et ceux qui disséminent ces informations «sont des criminels», a dénoncé Robert Gibbs, porte-parole de la présidence américaine, jugeant que ces fuites constituent «de graves violations de la loi et une menace grave pour ceux qui mènent et aident notre politique étrangère».

De son côté, la secrétaire d'État Hillary Clinton a parlé d'une «attaque contre la communauté internationale».

Les documents, récupérés par WikiLeaks et communiqués à plusieurs grands médias, jettent une lumière crue sur les coulisses de la diplomatie américaine.

On y apprend pêle-mêle que le roi Abdallah d'Arabie saoudite s'est prononcé auprès de Washington pour une attaque contre l'Iran, que les diplomates américains voient en Nicolas Sarkozy un homme «susceptible et autoritaire», ou que la Russie serait un «État mafieux virtuel».

Lundi, les partenaires de Washington reprenaient la rhétorique empruntée par les États-Unis, en vilipendant les méthodes du site internet.

La France a déploré une divulgation «délibérée et irresponsable» et le numéro deux du gouvernement, Alain Juppé, a jugé «scandaleux» et «irresponsable» la façon de faire de WikiLeaks.

En Italie, le ministre des Affaires étrangères, Franco Frattini, a dit craindre un «11-Septembre de la diplomatie mondiale».

Mahmoud Ahmadinejad, le président iranien mis au même plan qu'Adolf Hitler dans certaines notes américaines, a jugé ces documents «sans valeur», expliquant dans un même souffle que ces publications «font partie d'une campagne de guerre d'information» contre Téhéran, orchestrée par les États-Unis.

Mais les dirigeants moqués ou mis en cause dans ces notes se sont empressés d'assurer que ces «ragots», comme le dit Guido Westerwelle, ministre allemand des Affaires étrangères, ne portaient pas atteinte à leurs relations avec Washington. A l'image d'un porte-parole du Premier ministre britannique David Cameron, qui a assuré que son pays continuerait à «travailler étroitement avec les États-Unis».

A Washington, le ministre turc des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu a indiqué qu'il comptait aborder dès lundi la question des notes, qui le qualifient «d'exceptionnellement dangereux», avec Mme Clinton.

L'Afghanistan ne pense pas non plus que ses relations avec les Etats-Unis subiront des dommages, en dépit de documents décrivant le président Hamid Karzaï comme «faible» et son frère Ahmed Wali comme un baron de la drogue corrompu.

Au Proche-Orient, un haut responsable israélien estime qu'Israël «s'en tire à très bon compte», les fuites confirmant la position officielle d'Israël en faveur d'une grande fermeté à l'égard de Téhéran.

Côté américain, la riposte s'articule autour de deux axes: poursuites judiciaires et prévention contre de nouvelles fuites.

Le ministre de la Justice Eric Holder a rappelé qu'une «enquête pénale est en cours, nous ne sommes pas en position pour l'instant de donner des résultats, mais l'enquête est en cours».

En outre, la Maison-Blanche a annoncé avoir ordonné un passage en revue des procédures de sécurité pour éviter de nouvelles révélations.

Note discordante: le Pentagone a indiqué que la mise en place de nouvelles procédures pour empêcher le téléchargement non autorisé de données sensibles ne garantit pas contre de nouvelles fuites à l'avenir.