L'attentat raté de New York a ravivé le traumatisme de la ville frappée au coeur le 11 septembre 2001 et convaincu les autorités locales de couvrir Manhattan d'un réseau de caméras censé repérer le moindre comportement suspect.

La pointe de l'île de Manhattan, où s'élevaient les tours jumelles détruites le 11 septembre, est déjà protégée par un système de surveillance copié sur celui utilisé dans le quartier des affaires de Londres, la ville qui compte le plus grand nombre de caméras allumées en permanence.

Mais l'attentat manqué de samedi, lorsqu'une voiture garée tout près de Times Square a connu un début d'explosion, va pousser les autorités à accélérer le système à Midtown, le quartier le plus actif de la métropole réunissant pléthore de bureaux, commerces, théâtres et restaurants.

«Ce système améliorera grandement la capacité de la police à détecter des activités suspectes en temps réel et à déjouer des attentats éventuels», a déclaré lundi le maire de la ville, Michael Bloomberg.

Le réseau prévu, appuyé par des détecteurs et des logiciels d'analyse, va très au-delà des 82 caméras de police déjà en place à Times Square. Il ne se contente pas d'observer mais rassemble en permance des données telles que les plaques d'immatriculation. Il détecte la présence d'armes ou d'explosifs, tout en suivant les faits et gestes des passants ou des automobilistes.

Un des aspects centraux du dispositif est l'interconnexion entre le réseau de surveillance de la police et celui des entreprises privées, qui filment en permanence leur pas de porte. Après l'attentat manqué de samedi soir, les enquêteurs ont perdu du temps à récupérer les images filmées par ces caméras privées.

Un autre dispositif en préparation, «Operation Sentinel», prévoit d'enregistrer le numéro de chaque véhicule entrant dans Manhattan afin de vérifier si les plaques n'ont pas été invalidées. Dans le cas de la voiture piégée laissée samedi, les plaques d'immatriculation appartenaient apparemment à un autre véhicule, que son propriétaire avait envoyé à la casse.

Le chef de la police de New York, Raymond Kelly, a expliqué samedi que le logiciel prévu déclencherait une alarme lorsqu'une caméra détecterait un sac abandonné où que le même véhicule tournerait plusieurs fois autour du même pâté de maisons.

M. Kelly a demandé l'aide de l'administration fédérale pour financer le programme, dont la mise en place à Midtown doit déjà couter 110 millions de dollars à la ville, selon le maire.

Les caméras sont un élément indispensable de la lutte anti-terroriste, justifient les autorités new-yorkaises, qui font valoir que Najibullah Zazi, un Afghan arrêté fin 2009 pour avoir voulu commettre un attentat dans le métro de New York, avait été filmé en train d'acheter des produits chimiques pour fabriquer des explosifs, une preuve cruciale retenue contre lui.

Mais d'autres s'inquiètent de voir la plus grande ville des États-Unis s'enfoncer dans un cauchemar orwellien, au péril des libertés individuelles.

L'association New York Civil Liberties Union a ainsi porté plainte contre le département de la sécurité intérieure afin d'obtenir plus d'information sur le projet en cours, notamment comment les autorités comptent utiliser, partager et stocker les informations qu'elles obtiendront via les caméras.

Ce qui est sûr, c'est que les deux dernières tentatives d'attentat commises aux États-Unis ont été déjouées grâce à la vigilance de témoins et pas par la technologie: la voiture qui fumait à Times Square a alerté un vendeur de tee-shirts qui a appelé la police et le Nigerian qui voulait faire sauter le vol Amsterdam-Detroit le jour de Noël a été maîtrisé par un autre passager.