En dépit d'une farouche opposition au Congrès, la Maison-Blanche n'exclut pas de relâcher d'anciens détenus du camp de Guantanamo sur le sol américain. Mais devant une gamme d'options se rétrécissant sans cesse, l'administration Obama a commencé à transférer à l'étranger des prisonniers innocentés, dont trois ont été renvoyés vers l'Arabie saoudite.

Les perspectives d'un transfert de prisonniers de Guantanamo à Cuba vers les États-Unis ont diminué au cours des dernières semaines en raison des décisions du Congrès de bloquer tout financement de ces déplacements. Et des pays étrangers se sont montrés hésitants à accueillir des détenus, même disculpés, dont on juge qu'ils ne posent pas de menaces pour la sécurité.

Dans un entretien à l'Associated Press, le président de l'archipel de Palau (Pacifique) a notamment déclaré que l'arrivée de 13 ex-détenus ouïghours dans le pays, dont l'annonce lui a valu beaucoup de publicité, n'était pas encore garantie. «C'est encore provisoire», la probabilité est d'environ «50-50», a expliqué Johnson Toribiong samedi. Et même si l'archipel situé à environ 800km à l'est des Philippines accepte de recevoir ces détenus de confession musulmane dont la Chine -qui les accuse de terrorisme- demande le rapatriement, le processus prendra encore entre deux et trois mois.

Reste que cette semaine a été marquée par le départ sous haute sécurité de neuf détenus de Guantanamo vers des États étrangers et d'un dixième vers les États-Unis où il est appelé à être jugé.

Le porte-parole de la Maison-Blanche Robert Gibbs a estimé vendredi que la libération de ces détenus témoignait d'un «progrès net» et que d'autres décisions seraient prises sur la base du cas par cas. Le président Barack Obama, qui s'est engagé à fermer Guantanamo d'ici début 2010, avait déclaré en mai que les dossiers de 50 détenus avaient été étudiés, et d'après l'administration, 48 d'entre eux attendent d'être relâchés dans des pays étrangers.

Robert Gibbs a précisé que la Maison-Blanche n'avait pas renoncé à la possibilité de relâcher des détenus sur le sol américain, mais a tenu à souligner que toute mesure de cet ordre serait dictée par des impératifs de sécurité nationale.

«Nous n'allons prendre aucune décision sur un transfert ou une libération qui menace la sécurité du pays», a-t-il assuré.

Trois des détenus relâchés -Khaled Saad Mohammed, Abdalaziz Karim Salim al-Noufayahi et Ahmed Zaïd Salim Zouhair- ont été renvoyés vers l'Arabie saoudite, ont annoncé vendredi les autorités américaines. Zouhair observait une grève de la faim de Guantanamo depuis près de quatre ans pour protester contre sa détention.

Le ministère américain de la Justice a expliqué que les dossiers de ces trois hommes feraient l'objet d'une révision judiciaire en Arabie saoudite avant qu'ils ne participent à un programme de «réhabilitation» dirigé par les autorités.

Quatre autres ex-détenus de Guantanamo ont été envoyés aux Bermudes, deux au Tchad et en Irak, tandis qu'un dixième a été transféré à New York en prévision d'un procès au civil.

Des responsables américains ont affirmé sous couvert d'anonymat être proches d'un accord avec l'Arabie saoudite et le Yémen, qui verrait Riyad accueillir une centaine de détenus yéménites dans des centres de réhabilitation sous administration saoudienne. Ils n'ont pas précisé combien de Yéménites pourraient être transférés et la date à laquelle l'accord pourrait être finalisé.

Les négociations sur le sort des détenus yéménites sont en cours depuis des mois mais ont buté, selon ces responsables, sur une requête des Saoudiens qui demandent que le président yéménite Ali Abdallah Saleh approuve publiquement la proposition. Ce dernier aurait refusé par crainte de répercussions au sein de la population et émis la préférence fin mai que le Yémen mette sur pied ses propres centres.

Entre les différents transferts et l'accord de principe avec l'archipel de Palau, il reste 229 prisonniers au centre de détention militaire américain de Guantanamo à Cuba.

À côté des détenus qui pourraient être libérés, jugés ou remis à des pays étrangers, il y en a d'autres -dangereux- qui ne peuvent être ni relâchés ni jugés, aux dires de l'administration américaine. Parmi ces individus «qui demeurent en guerre avec les États-Unis», selon Barack Obama, figurent des détenus qui pourraient avoir reçu une formation au sein du réseau Al-Qaeda, commandé des combattants talibans ou fait allégeance à Oussama ben Laden.