Le président Barack Obama prépare un décret prévoyant la fermeture du centre de détention de Guantanamo d'ici un an, selon un projet de texte de la Maison-Blanche dont l'Associated Press a obtenu copie mercredi.

Le Pentagone avait auparavant annoncé avoir demandé une suspension de 120 jours de la procédure judiciaire pour les détenus de la base navale américaine à Cuba, en attendant le réexamen de leurs dossiers. Deux magistrats militaires chargés du dossier de six accusés ont rapidement fait droit à cette requête.

Barack Obama, durant sa campagne électorale, s'est engagé à fermer rapidement le centre de détention controversé ouvert en 2002, après les attentats du 11 septembre 2001. Quelque 245 terroristes présumés y sont toujours détenus, la plupart sans inculpation ni jugement en dehors de tout cadre légal. L'ancienne administration Bush a toujours considéré les prisonniers de Guantanamo comme des «combattants ennemis», ne bénéficiant pas des droits conférés par la loi fédérale américaine ou les Conventions de Genève sur les prisonniers de guerre.

On ignore quand le président Obama compte publier le décret de fermeture. Le nouveau chef de la Maison-Blanche a reconnu le 11 janvier lors d'un entretien à la chaîne américaine ABC que la fermeture rapide du camp serait plus difficile à appliquer que prévu. Une «partie» des difficultés provient de la situation juridique d'individus pouvant «être très dangereux», qui n'ont fait l'objet d'aucun procès ou décision judiciaire, faisait-il valoir.

Le projet de décret, précisément, prévoit un rééxamen systématique des dossiers, pour chaque détenu. «Il est dans l'intérêt des États-Unis d'évaluer si chacun de ces individus peut et doit être poursuivi en justice», explique le texte. Il préconise une fermeture du centre de détention «aussi rapide que possible», dans un délai ne dépassant pas «un an».

Un porte-parole du Pentagone, Bryan Whitman, a confirmé que la hiérarchie militaire allait passer en revue «les politiques et procédures relatives aux activités de détention» dans l'optique de ce décret. «Le président a fait clairement connaître ses intentions», a-t-il rappelé. «Et il a pris les premières mesures dans cette direction en ordonnant une pause des procédures des commissions militaires» chargées de juger les détenus inculpés, a ajouté le porte-parole.

A la demande du président Obama et du ministre de la Défense Robert Gates, le procureur militaire Clay Trivett a déposé dans la nuit de mardi à mercredi une requête demandant une suspension immédiate, pour 120 jours, de la procédure utilisée contre les détenus incarcérés à Guantanamo, ce qui servirait «les intérêts de la justice».

Au total 21 personnes incarcérées à Guantanamo sont inculpés de crimes de guerre, dont cinq accusés dans le dossier des attentats du 11 septembre.

Le moratoire, en pratique, «interrompt la procédure, probablement pour toujours», a commenté le capitaine de corvette William Kubler, avocat d'Omar Khadr, un ressortissant canadien accusé d'avoir tué un soldat américain en Afghanistan en 2002. Lors d'une audience mercredi sur la base militaire de Guantanamo, un juge militaire, le colonel Patrick Parish, a donné son feu vert pour une suspension de 120 jours de la procédure dans le dossier Khadr.

Un autre magistrat militaire, le colonel Stephen Henley, a ultérieurement statué en faveur de la requête concernant les cinq autres accusés, qui se sont pour leur part opposés à cette suspension de quatre mois. Les cinq hommes ont en effet annoncé leur intention de plaider coupables, espèrant une condamnation à mort qui leur permettrait de devenir des martyrs. «Nous devons continuer, ne pas faire marche arrière mais avancer», a ainsi déclaré Khalid Mohammed, cerveau présumé des attentats.

Jamil Dakwar, un avocat de l'Association américaine des libertés civiles (ACLU), a estimé que le moratoire constituait un «pas important dans la bonne direction». A Bruxelles, la Commission européenne, selon son porte-parole Michele Cicone, s'est félicitée «qu'une des premières actions de M. Obama ait été de tourner la page de ce triste épisode de Guantanamo».