Donald Trump coiffé d'une auréole souhaite la bienvenue aux visiteurs dans l'édifice patrimonial du XVIIe siècle. Quand on regarde de plus près, on voit quele sourire béat de saint Trump n'a rien à voir avec une quelconque illumination religieuse. Le candidat républicain tient dans ses mains une liasse de billets de 100 $US.

Cette caricature donne le ton à l'exposition Un muro de caricaturas (Un mur de caricatures) qui fait affluer les foules ces jours-ci au modeste Musée de la caricature de Mexico, situé dans le centre historique de la mégapole.

« Trump a tellement inspiré les caricaturistes du Mexique et d'ailleurs dans le monde que nous avons décidé d'en faire une compilation. En tout, nous avons amassé plus de 900 dessins, dit Luis Xavier Saenz De Miera Santana, qui publie ses caricatures décapantes dans les médias mexicains depuis 38 ans. Trump, c'est un sujet sans fin. Il s'en est pris à tous les sujets sensibles : les femmes, les immigrants, les étrangers. Il a insulté absolument tout le monde avec sa rhétorique raciste. »

FRAPPER SUR LE VOISIN DU SUD

Le Mexique a été la cible de choix du candidat républicain à la Maison-Blanche qui, dès le début de sa campagne, a accusé les Mexicains de faire entrer la drogue et le crime aux États-Unis. Donald Trump a ensuite promis de construire un mur à la frontière sud du pays, d'expulser les quelque 12 millions d'immigrants sans papiers qui vivent sur le territoire américain et a menacé de mettre fin à l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA).

L'économie mexicaine en a rajouté en étant frappée de plein fouet par la campagne du candidat républicain. Depuis le début de l'année, le peso mexicain perd de la valeur dès que Donald Trump monte dans les intentions de vote. Les villes du nord du Mexique, situées près de la frontière, ont vu fuir les investisseurs étrangers, apeurés par le climat d'incertitude. Et cette semaine, le Financial Times a rapporté que des financiers américains avaient fait des paris contre la Bourse mexicaine, s'attendant à son effondrement si l'homme d'affaires républicain triomphait ce soir.

TRUMP, CE FASCISTE

La réponse des caricaturistes mexicains prenant part à l'exposition du Musée de la caricature à ces attaques répétées est cinglante. Sur plusieurs images, Donald Trump est comparé à Hitler, à Mussolini et à Kim Jong-un, le dictateur nord-coréen.

Sur un dessin, on voit le multimilliardaire dire en espagnol que son mur deviendra l'Auschwitz des Mexicains. Sur d'autres caricatures encore, Donald Trump porte la cagoule du Ku Klux Klan. Ou prend un égoportrait avec le diable.

Luis Xavier ne croit pas que le propos de l'exposition est excessif. « Si on analyse le discours de Trump, il y a de vraies similitudes avec la rhétorique d'Adolf Hitler, ajoute le caricaturiste. S'il est élu, il y aura une crise au Mexique. On parle beaucoup de l'impact qu'il pourrait avoir sur l'économie, mais la construction du mur pourrait être terrible ainsi que l'expulsion d'immigrants », dit le dessinateur, ajoutant que les caricaturistes du monde entier ont travaillé très fort au cours de la dernière année pour mettre à jour le « vrai visage » de Trump.

L'HUMOUR COMME ARME POLITIQUE

Les Mexicains répondent bien à ces critiques au vitriol. « L'humour politique, c'est dans notre ADN. On rit de toutes les tragédies, alors pourquoi pas de Trump ? », dit le dessinateur en haussant les épaules. En plus de l'exposition de caricatures, une pièce de théâtre et une émission de télé anti-Trump ont connu un succès de masse au cours des derniers mois.

Au marché de la Merced, le plus grand en son genre à Mexico, l'humour politique a permis à Juan Morales de faire de bonnes affaires au cours des derniers mois. Commerçant de piñatas, il n'a plus de poupées à l'effigie du multimilliardaire à vendre à ses concitoyens qui veulent se défouler tout en riant. « J'en ai vendu au moins une quarantaine dans les deux dernières semaines. Je n'ai jamais vu une piñata avec un tel succès », dit-il, assis sous un gros Pikachu. « Que Trump gagne ou qu'il perde, on continuera à en vendre », note-t-il, ajoutant que la haine des Mexicains à son endroit est là pour rester.

Quelques stands de piñatas plus loin, Alicia Casasola raconte qu'elle a arrêté de vendre des piñatas de Trump. « Que pouvons-nous faire ? C'est aux Américains à frapper sur cette piñata-là. Pas à nous ! Et j'espère qu'ils vont frapper fort [aujourd'hui] », dit la Mexicaine en épluchant des tomatillos. « S'il gagne, plein de gens vont venir s'installer ici et au Canada », affirme-t-elle, estimant que si les élections américaines peuvent faire mal au Mexique, ce sont les États-Unis qui ont le plus à perdre.