(Tokyo) Le Japon a modifié sa définition du viol et a relevé l’âge du consentement de 13 à 16 ans, vendredi, rapprochant ainsi la législation du pays en matière de crimes sexuels de celle des États-Unis et de l’Europe.

La nouvelle loi, adoptée à l’unanimité par la Chambre haute du Parlement, définit le viol comme un « rapport sexuel non consensuel » et supprime l’obligation de recourir à la force physique pour commettre ce crime. Jusqu’à présent, les lois japonaises sur les agressions sexuelles ne mentionnaient pas le consentement, ce qui témoignait d’un certain scepticisme quant à la possibilité de contraindre quelqu’un à avoir des relations sexuelles sans violence.

Le Japon avait auparavant l’un des âges de consentement les plus bas parmi les pays riches, ce qui rendait les enfants vulnérables aux sévices sexuels commis par des adultes.

Toutefois, en vertu de la nouvelle loi, pour les victimes âgées de 13 à 15 ans, les relations sexuelles ne seront considérées comme un crime que si le partenaire a au moins cinq ans de plus que l’enfant. La nouvelle loi, qui a été approuvée par la Chambre des représentants en mai, est la première qui modifie l’âge du consentement au Japon depuis plus de 100 ans.

La nouvelle loi définit plusieurs conditions dans lesquelles une personne peut avoir peur de refuser un rapport sexuel, même si elle n’est pas directement menacée de violence. Il s’agit notamment des cas où la victime a consommé de l’alcool ou des drogues ou lorsque l’agresseur « l’effraie ou la surprend ».

Les lois des États-Unis et de certains pays européens tiennent déjà compte du fait qu’une personne peut ne pas être en mesure de donner son consentement en raison d’une maladie ou d’un état d’ébriété, ou qu’un délinquant peut exploiter une situation d’autorité.

Peu de plaintes

Jusqu’à présent, en raison du niveau élevé des critères à respecter pour qu’une agression sexuelle soit officiellement qualifiée de viol au Japon, peu de victimes ont porté plainte.

Par exemple, lorsque la journaliste Shiori Ito a affirmé qu’un éminent journaliste de télévision l’avait violée alors qu’elle était inconsciente et incapable de donner son consentement, les procureurs ont refusé d’engager des poursuites. Mme Ito a ensuite obtenu des dommages et intérêts dans une affaire civile contre Noriyuki Yamaguchi, ancien chef du bureau de Washington du Tokyo Broadcasting System, lorsqu’un juge a accepté sa version de l’agression.

Les défenseurs des victimes d’agressions sexuelles affirment depuis longtemps que les lois japonaises sur le viol sont obsolètes en raison de l’absence de toute mention du consentement et de l’âge peu élevé de ce dernier.

Autre exemple, au début de l’année, Meiko Sano a poursuivi en vain son ancien professeur pour harcèlement sexuel, alléguant qu’il avait profité de sa position de superviseur pour la préparer à une relation à laquelle elle disait ne pas pouvoir consentir.

Les avocats et les militants qui soutiennent les victimes d’agressions sexuelles affirment depuis longtemps que la loi devrait tenir compte du fait que les personnes qui craignent des représailles de la part d’enseignants, de patrons ou d’autres personnes en position d’autorité ne peuvent pas consentir librement à des relations sexuelles.

Vent de changement

Lors d’une conférence de presse organisée après l’adoption du projet de loi vendredi, Kazuko Ito, une avocate qui a représenté des victimes d’agressions sexuelles, a déclaré qu’il s’agissait d’un « grand pas en avant ».

« Il est très important que les victimes qui ont été exclues de la justice puissent désormais bénéficier de recours et de sanctions juridiques », a déclaré Mme Ito.

La nouvelle loi concerne également les attouchements ou les incidents au cours desquels des adultes « contrôlent psychologiquement » des enfants sur des sites de réseautage social. Elle a également porté de 10 à 15 ans le délai de prescription pour le dépôt d’une plainte pour viol.

Lisez l’article original sur le site du New York Times (en anglais, abonnement requis)