(Brasilia) Jair Bolsonaro, qui a annoncé son retour au Brésil jeudi pour la première fois en tant qu’ex-président après un exil de trois mois aux États-Unis, est dans le collimateur de la justice pour plusieurs affaires et encourt des peines de prison.

De quoi est-il accusé ?

L’ex-président d’extrême droite est sous le coup de cinq enquêtes à la Cour suprême dans des affaires qui pourraient lui valoir des peines de réclusion.

Quatre d’entre elles portent sur des délits présumés commis durant son mandat (2019-2022), et une cinquième sur des soupçons d’incitation de ses partisans à prendre part aux émeutes du 8 janvier dernier à Brasilia.

L’une des enquêtes a été ouverte en 2020, quand son ancien ministre de la Justice l’a accusé d’ingérence auprès de la Police fédérale pour protéger des proches soupçonnés de corruption.

Il fait également l’objet d’enquêtes pour désinformation sur le système d’urnes électroniques ou sur la COVID-19.

Avec l’immunité présidentielle, il ne pouvait être jugé que par la Cour suprême.

À présent, les affaires peuvent être prises en charge par des tribunaux de première instance, où les procédures sont généralement plus courtes.  

Dans le cas « très peu probable » où Jair Bolsonaro serait condamné aux peines maximales pour l’ensemble des délits qui lui sont imputés, il pourrait passer près de 40 ans derrière les barreaux, selon Carla Junqueira, avocate et docteure en Droit de l’Université de Sao Paulo.

Peut-il être incarcéré ?

L’ancien chef de l’État a lui-même reconnu récemment que ce risque était réel. « Un mandat d’arrêt peut arriver sans crier gare », a-t-il confié en février au quotidien Wall Street Journal.

Au Brésil, une personne condamnée ne peut être incarcérée que quand tous ses recours sont épuisés, à moins qu’elle ne représente un danger pour la société.

La détention préventive est également possible si un juge estime que le suspect risque de compromettre l’enquête, en détruisant des preuves, par exemple.

Il est peu probable que Jair Bolsonaro soit condamné définitivement par toutes les instances (il y en a quatre au Brésil) à court terme. Le jugement de tous les recours peut prendre des années.

Peut-il être déclaré inéligible ?

Jair Bolsonaro est également sous le coup de 16 enquêtes au Tribunal supérieur électoral (TSE).

Il pourrait être condamné à huit ans d’inéligibilité, ce qui l’empêcherait de se présenter à la présidentielle de 2026.

L’ex-président est notamment mis en cause pour ses attaques verbales répétées contre le système d’urnes électroniques.

Des plaintes dénoncent par ailleurs l’usage de l’appareil de l’État à des fins électorales.  

Son gouvernement a par exemple fait approuver au Congrès une augmentation des minima sociaux à quelques mois du scrutin d’octobre dernier, qu’il a finalement perdu face au président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva.

Mais l’enquête la plus avancée, qui représente selon les spécialistes une vraie menace pour son avenir politique, porte sur une réunion avec des ambassadeurs en juillet dernier à Brasilia.

Face à des diplomates d’une quarantaine de pays, M. Bolsonaro a montré une présentation sur PowerPoint truffée de fausses informations sur les urnes électroniques, ce qui lui vaut d’être soupçonné d’abus de pouvoir.

L’affaire des bijoux saoudiens

L’ex-président d’extrême droite est également sous pression en raison d’un autre scandale, qui a fait les gros titres de la presse brésilienne : il est accusé d’avoir fait entrer illégalement au Brésil des bijoux offerts par l’Arabie saoudite.

L’affaire a été révélée par le quotidien Estadao, qui a fait état de la saisie par la douane brésilienne d’une parure de diamants évaluée à trois millions d’euros destinée à l’ancienne première dame Michelle Bolsonaro.  

Ces bijoux se trouvaient dans le sac d’un assistant d’un ministre du gouvernement Bolsonaro qui revenait d’une visite officielle à Riyad, en octobre 2021, et ils n’avaient pas été déclarés au préalable.

Un autre lot, de bijoux masculins, est arrivé en possession de Jair Bolsonaro, qui les a restitués la semaine dernière par le biais de ses avocats, à la demande de la Cour des Comptes.

Mardi, Estadao a révélé l’existence d’un troisième lot, avec notamment une montre Rolex sertie de diamants, que l’ancien président a reçu lors d’un voyage en Arabie saoudite en 2019, et qu’il aurait conservé.

Selon la loi brésilienne, quand il s’agit de cadeaux reçus de la part d’un pays tiers, seuls des cadeaux à caractère très personnel ou d’une valeur minimale peuvent être conservés par le chef de l’État.

Pour le ministre de la Justice actuel, Flavio Dino, Bolsonaro pourrait faire l’objet de poursuites pour appropriation illégale de biens publics ou pour fraude fiscale.

L’ancien président devra s’expliquer sur les bijoux saoudiens devant la Police fédérale le 5 avril, a confirmé mercredi une source policière à l’AFP.