(Las Tejerías) José Santiago s’est accroché pendant 40 minutes à une antenne tandis que l’eau et la boue envahissaient plusieurs maisons, dont la sienne : il est un des survivants du glissement de terrain qui a fait au moins 36 morts et 56 disparus samedi à Las Tejerias, au centre-nord du Venezuela.

« J’étais piégé par les flots et je n’avais pas d’autre choix que de grimper sur le toit et de m’accrocher à l’antenne », raconte José, 65 ans, conscient d’avoir échappé à la mort : « c’est une renaissance ! L’eau m’arrivait jusqu’au cou. J’étais prêt (à mourir). S’il avait plu cinq minutes de plus, je me noyais ».

Les équipes de secours recherchaient lundi sans répit d’éventuels survivants ou les corps des disparus dans la boue qui a envahi cette ville industrielle de 50 000 habitants.

Depuis plusieurs semaines, des pluies diluviennes qui s’abattent sur le Venezuela avaient déjà provoqué la mort de 13 personnes dans d’autres secteurs du pays.  

Mais, rien de comparable à la catastrophe de samedi.  

José, qui vit à Las Tejerias depuis des années, a constaté que l’eau s’engouffrait dans sa maison après la montée simultanée des cours de cinq ruisseaux environnants. Il pensait être en sécurité sur le toit mais s’est senti piégé en quelques minutes. Serrant l’antenne de toutes ses forces, il a été percuté par de nombreux débris flottant à la surface et a vu l’eau soulever des voitures et des pans entiers de maisons.

Quand l’eau s’est retirée, une dizaine de voisins se sont précipités à son secours.

« Comme le Phénix »

Électricité et communications ont été coupées, les antennes des opérateurs téléphoniques ayant été également été emportées.  

Maria Gracia Carvalhais, une commerçante de 60 ans, arrivée du Portugal au Venezuela à l’âge de deux ans, essaie de retenir ses larmes en voyant sa quincaillerie dévastée. Elle avait été fondée par sa famille il y a plus de 60 ans…

Le violent débit de l’eau, qui s’est élevé de plus de six mètres, a renversé les deux portes métalliques du magasin, explique-t-elle en montrant une empreinte boueuse sur le mur.

Des ouvriers et des voisins l’ont aidée à enlever les débris et la boue à la pelle. Maria estime que 80 % de son magasin est détruit : des murs se sont écroulés et ses articles à la vente sont couverts de boue.  

« Tout a été endommagé mais l’important est que nous soyons en vie », se console Maria.

« Le temps hier (samedi) était étrange. Je conduisais depuis La Victoria (20 km à l’ouest), j’avais le soleil derrière moi et devant moi le nuage le plus noir que j’ai jamais vu de ma vie avec deux arcs-en-ciel », raconte-t-elle.

Si c’est le plus fort déluge de pluie qu’elle n’ait jamais vu, « comme le Phénix, nous allons nous relever », affirme Maria.  

À quelques mètres, sa sœur Karina de Faria, 53 ans, a elle vu sa boulangerie complètement emportée.

Elle et six ouvriers ont échappé à la coulée de boue en se réfugiant sur les hauteurs de la ville. C’est le moment de « remercier Dieu d’être en vie, parce qu’il y a tellement de morts, et tous mes employés sont en vie », souffle-t-elle, en sanglotant.

Carmen Melendez, une habitante est sous le choc : « la ville est perdue, Las Tejerias est perdue », répète-t-elle hébétée. Le gouvernement a décrété trois jours de deuil national.  

Dimanche et lundi, les équipes de secours, encadrées par un important dispositif policier et militaire, dégageaient arbres et débris à l’aide de machines et d’outils, et évacuaient la boue recouvrant les rues.  

« C’est arrivé trop vite, on n’a eu le temps de ne rien faire », se désole Carlos Camejo, 60 ans, en aidant à la panser les plaies de sa ville dévastée.