(Buenos Aires) Un homme a été arrêté jeudi soir à Buenos Aires après avoir pointé sur arme à feu chargée sur la vice-présidente Cristina Kirchner quand elle rentrait chez elle, un incident condamné par l’ensemble de la classe politique.

Selon des images de plusieurs télévisions, l’homme a pointé une arme de poing vers la tête de Mme Kirchner à quelques mètres, sans qu’aucun coup de feu ne parte, alors qu’elle rencontrait des sympathisants venus l’attendre au bas de chez elle, dans le quartier de Recoleta.

« J’ai vu ce bras surgir par-dessus mon épaule derrière moi avec une arme, et avec des gens autour de moi il a été maîtrisé », a raconté sur place à l’AFP un soutien de Mme Kirchner, qui n’a pas souhaité donner son nom, et que les images TV montrent clairement participer à la brève mêlée.

PHOTO AGENCE FRANCE-PRESSE

Selon des images de plusieurs télévisions, l’homme a pointé une arme de poing vers la tête de Cristina Kirchner à quelques mètres.

Des policiers ont alors saisi le suspect, l’ont mené dans une voiture de police dans une rue attenante, aussitôt entourée par un épais cordon de policiers. Celle-ci est partie peu après sous les cris et huées de plusieurs dizaines de personnes présentes, a constaté l’AFP.

Le ministre de la Sécurité Anibal Fernandez a confirmé peu après l’arrestation du suspect. « Maintenant, la situation doit être analysée par nos personnels de la police scientifique pour analyser les empreintes, la capacité et la disposition qu’avait cette personne », a déclaré le ministre.

Dans une allocution tard dans la soirée, le président Alberto Fernandez a affirmé que « l’arme du suspect contenait cinq balles », mais que « pour une raison qui n’a pas encore été confirmée techniquement, elle n’a pas fait feu bien qu’ayant été déclenchée ».

Le carrefour devant l’immeuble où réside Mme Kirchner a été rapidement bouclé par des rubans « scène de crime », et des policiers procédaient à des prélèvements.

Des centaines de militants se rassemblent chaque soir depuis une dizaine de jours devant le domicile de Cristina Kirchner, pour marquer leur soutien à l’ex-cheffe de l’État (2007-2015) actuellement en procès pour fraude et corruption.

Le 22 août, l’accusation a requis une peine de 12 ans de prison et une inéligibilité à vie contre Mme Kirchner, dans ce procès qui porte sur des attributions de marchés publics dans son fief de Santa Cruz (sud), pendant ses deux mandats présidentiels.

Le réquisitoire a donné lieu à plusieurs manifestations de soutien à Mme Kirchner par le noyau dur de la gauche péroniste dont elle est la figue de proue. Des rassemblements ont eu lieu en fin de semaine dernière dans plusieurs villes d’Argentine. Et chaque soir, de plusieurs centaines, au pied du domicile de la vice-présidente.

Fait « d’une énorme gravité »

Ils n’étaient que quelques dizaines jeudi soir au moment de l’incident, et l’atmosphère restait paradoxalement calme dans les deux heures suivantes. Parmi eux, Martin Frias, 48, un partisan péroniste de longue date, qui se désolait auprès de l’AFP d’un « climat de violence » politique dans le pays. « Violence dans les paroles, qui entraînent des passages à l’acte ».

L’incident de jeudi soir a été condamné par l’ensemble du camp gouvernemental ainsi que par la coalition d’opposition « Juntos por el cambio » (Ensemble pour le changement).

Le président Fernandez a dénoncé un fait « d’une énorme gravité, le plus grave survenu depuis que notre pays a retrouvé la démocratie ».

Le leader de l’opposition de droite et successeur de Mme Kirchner a la présidence Maurico Macri (2015-2019) a exprimé sa « répudiation absolue de l’attaque subie par Cristina Kirchner, qui n’a heureusement eu aucune conséquence pour la vice-présidente ». Il a demandé « une clarification immédiate et profonde de la justice et des forces de sécurité ».

Adulée par la gauche péroniste mais clivante et détestée par l’opposition, Cristina Kirchner est une figure de poids dans la politique argentine, a un an d’une élection présidentielle pour laquelle elle n’a pas fait connaître ses intentions.

Un verdict à son procès ne devrait être rendu que vers la fin 2022. Même en cas de condamnation, elle jouit au titre de présidente du Sénat d’une immunité parlementaire et pourrait ne pas aller en prison, voire se présenter aux élections générales d’octobre 2023.