L'Égypte a accusé dimanche le mouvement islamiste palestinien Hamas d'être impliqué, avec les Frères musulmans, dans l'attentat à la voiture piégée qui a coûté la vie en 2015 au Caire à son Procureur général Hicham Barakat.

Quarante-huit membres des Frères musulmans ont été arrêtés dont 14 ont «avoué» avoir participé directement à l'attentat, a précisé dans une conférence de presse le ministre égyptien de l'Intérieur Magdy Abdel Ghaffar.

«Ce complot a été exécuté sur l'ordre des Frères musulmans (...) en étroite coordination avec le Hamas qui a joué un rôle très important (...) dans l'assassinat du Procureur général et a supervisé l'opération du début à la fin», a assuré le ministre.

«Les accusations contre le Hamas à propos de l'assassinat du procureur général Hicham Barakat sont fausses», a affirmé Sami Abou Zouhri, un porte-parole du Hamas à Al-Aqsa, la télévision du mouvement islamiste.

Le Caire accuse régulièrement le Hamas, qui dirige le territoire palestinien autonome de Gaza, frontalier avec l'Égypte, de soutenir les Frères musulmans égyptiens, dont est issu l'ex-président Mohamed Morsi, élu démocratiquement en 2012 mais destitué et arrêté un an plus tard par l'armée.

Le nouveau pouvoir du président Abdel Fattah al-Sissi, l'ex-chef de l'armée tombeur de M. Morsi, réprime, depuis, dans le sang toute opposition islamiste.

Le Caire avait décrété en décembre 2013 les Frères musulmans «mouvement terroriste» et les accuse d'être responsables d'une vague d'attentats pourtant quasiment systématiquement revendiqués par la branche égyptienne du groupe djihadiste État islamique (EI).

Les Frères musulmans démentent systématiquement être responsables et condamnent ces attentats.

L'EI les considère d'ailleurs comme des «traîtres» à la cause musulmane, car ils ont opté pour la voie des urnes pour prendre le pouvoir plutôt que d'imposer un «califat» par les armes.

Le 29 juin 2015, une voiture piégée avait explosé au Caire au passage du convoi de M. Barakat, le plus haut magistrat du parquet égyptien, et cet homme de 64 ans avait succombé à ses blessures à l'hôpital.

Nommé après la destitution de M. Morsi, le procureur Barakat était considéré comme un opposant acharné aux islamistes.

Il avait notamment ordonné le déferrement devant des tribunaux de milliers de sympathisants  de M. Morsi et membres présumés des Frères musulmans, dont des centaines ont ensuite été condamnés à mort.

M. Morsi lui-même a écopé de la peine capitale en première instance dans un procès pour une évasion collective d'une prison du Caire lors de la révolte populaire de 2011 contre le régime de l'ex-président égyptien Hosni Moubarak, avec, selon l'accusation, la complicité du Hamas.

Selon le ministre, aucun membre du Hamas n'a directement participé à l'exécution de l'attentat contre le Procureur général, «mais ils ont participé à sa planification et à l'entraînement de ceux qui l'ont exécuté».

«Des membres du Hamas ont entraîné les meurtriers qui s'étaient infiltrés dans la bande de Gaza depuis le Sinaï», la péninsule désertique de l'est de l'Égypte et principal bastion de la branche locale de l'EI. Cette dernière avait appelé à tuer des magistrats peu avant la mort du procureur Barakat.

Mais l'attentat contre le Procureur général n'a jamais été revendiqué.

Depuis la destitution de M. Morsi, policiers et soldats ont tué plus de 1400 manifestants pro-Morsi et emprisonné des milliers de ses partisans.

Des centaines ont été condamnés à mort dans des procès de masse expéditifs vivement critiqués par l'ONU. Puis la répression s'est étendue aux mouvements laïcs et libéraux d'opposition, faisant dire aux organisations internationales de défense des droits de l'Homme que le régime de M. Sissi est aujourd'hui bien plus répressif que celui de Hosni Moubarak, chassé du pouvoir par la révolte de 2011.

Le Hamas, créé en 1987, est lui-même une émanation du mouvement international des Frères musulmans, la confrérie qui a essaimé dans plusieurs pays arabes depuis sa naissance en Égypte en 1928.