Dominic Ongwen, l'un des principaux chefs de la sanguinaire rébellion ougandaise de la LRA, a comparu lundi pour la première fois devant la Cour pénale internationale (CPI), qui le soupçonne de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité.

Vêtu d'un costume bleu, d'une chemise blanche et d'une cravate à carreaux dans les mêmes tons, Dominic Ongwen a écouté le début de l'audience de manière attentive et calme.

À la demande de la juge Ekaterina Trendafilova, ce dirigeant de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA) a confirmé son identité : «Mon nom est Dominic Ongwen et je suis un citoyen de l'Ouganda, du nord de l'Ouganda».

Cette audience intervient quelques jours après le transfert à La Haye de M. Ongwen, qui s'était constitué prisonnier auprès des forces spéciales américaines en Centrafrique début janvier, une reddition qui a porté un coup sévère à la LRA.

Commandée depuis sa création il y a une trentaine d'années par Joseph Kony, la LRA a depuis semé la terreur dans plusieurs pays d'Afrique centrale.

S'exprimant en acholi, la langue utilisée par la LRA, Dominic Ongwen a rappelé qu'il avait lui-même été enlevé par les soldats de Joseph Kony.

«J'ai été emmené dans la brousse quand j'avais 14 ans», a-t-il ajouté, soulignant avoir été un combattant «jusqu'à son arrivée à la Cour».

«Je voudrais remercier Dieu pour avoir créé le Paradis et la Terre, avec tous ceux qui sont sur la Terre», a également lancé cet homme aux cheveux courts et au visage fatigué.

Premier membre de la LRA à comparaître devant la CPI, Dominic Ongwen était recherché depuis près de dix ans par la Cour pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre. Les États-Unis offraient cinq millions de dollars pour sa capture.

60 000 enfants enlevés

Créée aux alentours de 1987, la LRA opérait alors dans le nord de l'Ouganda, où elle a multiplié les exactions (enlèvements d'enfants transformés en soldats et en esclaves, mutilations et massacres de civils).

Elle en a été chassée au milieu des années 2000 par l'armée ougandaise, avant de s'éparpiller dans les forêts équatoriales des pays alentour, dont la Centrafrique.

Selon l'ONU, la rébellion a, depuis sa création, tué plus de 100 000 personnes en Afrique centrale et enlevé plus de 60 000 enfants.

La juge Trendafilova a lu ses droits à Dominic Ongwen, lui rappelant qu'il pouvait suivre les procédures dans une langue qu'il comprend.

M. Ongwen est accusé de sept crimes contre l'humanité et crimes de guerre : il est poursuivi notamment pour meurtre, réduction en esclavage et traitements cruels.

La prochaine comparution de Dominic Ongwen doit avoir lieu le 24 août, pour des audiences destinées à évaluer les preuves rassemblées par le procureur et décider si un procès doit être tenu ou non.

Pour la procureure, le transfert de Dominic Ongwen rapproche l'accusation un peu plus de son objectif, à savoir «faire cesser le règne de la terreur imposé par la LRA dans la région des Grands Lacs».

Chef des opérations de la LRA, troisième dans l'échelle de commandement de la milice, Dominic Ongwen aurait été enlevé alors qu'il rentrait de l'école.

Des victimes de la LRA ont raconté les rites initiatiques brutaux de la milice, des enrôlés de force contraints de mordre et matraquer amis et parents à mort, de boire du sang.

En dépit de sa jeunesse, il avait très vite été repéré pour sa loyauté dans le crime, son courage au combat et ses qualités de tacticien.

Les ONG ont néanmoins souligné que le passé de Dominic Ongwen pourrait constituer des circonstances atténuantes, si un jugement de culpabilité devait être rendu à son encontre.

«La CPI l'accuse en partie des mêmes crimes qui ont été commis à son encontre», a déclaré un chercheur spécialiste de la LRA, Ledio Cakaj.

Joseph Kony reste le dernier dirigeant de la milice toujours en liberté, selon l'armée ougandaise. La LRA, qui mêle notamment références chrétiennes, islamiques et croyances acholi, ne compterait plus que 150 hommes environ.