Le sultan de Sokoto, chef des musulmans nigérians, a appelé dimanche ses coreligionnaires à s'unir contre le groupe islamiste armé Boko Haram, promettant tout son soutien au gouvernement dans sa lutte contre les extrémistes.

Mais Muhammad Sa'ad Abubakar III, a également souligné que le gouvernement devrait s'attaquer aux discriminations touchant les musulmans par rapport aux chrétiens, qui peuvent pousser certains vers les insurgés.

«Le terrorisme n'a pas sa place dans l'islam», a déclaré le leader devant la foule comprenant le vice-président Namadi Sambo, des religieux et des chefs coutumiers, dans la Mosquée nationale à Abuja, la capitale fédérale du Nigeria.

«Nous devons, comme d'habitude, nous élever pour condamner d'une seule voix tous les actes de terrorisme, condamner ces terroristes où qu'ils soient, et faire de notre mieux en tant que musulmans pour nous assurer que la paix règne dans notre communauté», a-t-il déclaré.

Le sultan, président du Conseil suprême des affaires islamiques du Nigeria, a subi des pressions pour qu'il s'exprime contre Boko Haram dont l'insurrection en vue de la création d'un État islamique dans le nord du pays a fait des milliers de morts.

Vendredi, il avait annoncé une journée de «prière pour la paix et la sécurité» afin de «relever des défis actuels du pays en matière de sécurité».

Dans ses premières déclarations publiques depuis que Boko Haram a enlevé plus de 200 adolescentes le 14 avril à Chibok (nord-est), il a déclaré que les musulmans étaient ébranlés par les sanglantes opérations du groupe.

«Nous nous engageons à aider le gouvernement à tous les niveaux pour apporter la paix au Nigeria. Quoi que nous puissions faire, tant que ce n'est pas contraire à l'islam, nous sommes prêts à le faire à 100 %», a-t-il dit.

«Nous devons dire très clairement que (...) la situation dans le pays est très grave. On combat un ennemi sans frontières. Des terroristes sont partout. Ils sont parmi nous et nous ne les connaissons pas», a déclaré le sultan de Sokoto.

La situation actuelle est pire que durant la guerre civile du Biafra (1967-1970)  parce que dans le cas de Boko Haram, «vous ne connaissez pas l'ennemi. La personne assise à côté de vous peut être l'un de ces terroristes. Vous ne savez pas», a-t-il souligné.

«Nous devons serrer les rangs en tant que musulmans, (...)  en tant que Nigérians, sans tenir compte des divisions ethniques ou politiques, et ne pas faire de politique avec l'insécurité», a ajouté le sultan.

Le nord du Nigeria, majoritairement musulman, est plus pauvre que le sud à dominante chrétienne et riche en pétrole et en gaz.

Des années de dégradation économique et sociale ont favorisé le recrutement par Boko Haram de jeunes marginalisés.

Selon le sultan de Sokoto, s'attaquer aux inégalités aiderait à résoudre le problème de l'insurrection islamiste.

«Les musulmans veulent être traités avec égalité, justice, équité et le demandent, et Inch Allah, les choses vont changer», a-t-il dit.

Boko Haram a plusieurs fois menacé les dignitaires des anciens royaumes musulmans du nord, dont le sultan de Sokoto, l'émir de Kano et le cheik de l'État de Borno, forteresse des insurgés.

Les dignitaires basés à Kano et à Borno ont tous les deux survécu à des tentatives d'assassinat par Boko Haram.

Le groupe islamiste accuse ces chefs de trahir l'islam en faisant allégeance au gouvernement civil du Nigeria.

Des analystes émettent des doutes sur la capacité des religieux à mettre fin à la violence de Boko Haram qui a fait déjà plus de 2000 morts depuis le début de l'année.