«Le fait que BuzzFeed et CNN aient pris la décision de publier ces allégations non corroborées est une tentative triste et pitoyable d'obtenir des clics.»

Sean Spicer, prochain directeur des communications et porte-parole de la Maison-Blanche, a proféré hier matin ce mensonge que Donald Trump a répété au cours de sa conférence de presse en accusant les deux médias de se complaire dans les «fausses nouvelles».

Or, CNN et BuzzFeed n'ont pas traité de la même façon le désormais célèbre dossier de 35 pages compilé par un ancien espion du MI6 faisant état d'informations compromettantes dont disposerait la Russie sur le compte du président désigné des États-Unis.

Prétendre le contraire, c'est tenter de miner de façon malhonnête la crédibilité d'un média, en l'occurrence CNN, en lui attribuant la décision d'un autre.

CNN, rappelons-le, a révélé mardi que les renseignements américains avaient remis à Barack Obama et à son successeur un document de deux pages résumant les notes compilées par l'ex-agent du renseignement britannique. La chaîne n'a pas détaillé les allégations contenues dans les notes, se contentant de dire que les informations non corroborées sur Trump étaient de nature personnelle et financière.

Hier soir, dans un communiqué, le directeur du Renseignement national James Clapper a confirmé indirectement l'exactitude du reportage de CNN, tout en démentant diplomatiquement l'accusation formulée par le président désigné plus tôt dans la journée selon laquelle les renseignements américains avaient fuité le dossier de 35 pages de l'ex-espion du MI6.

Clapper a précisé que les renseignements n'avaient «aucun jugement quant à la fiabilité des informations contenues dans ce document» mais que ceux-ci jugeaient important que son existence soit connue du président et de son successeur. Le FBI continue son enquête sur les allégations contenues dans le dossier.

Voilà pour la vérité qui a valu au journaliste Jim Acosta de CNN d'être rabroué par Trump hier lors de sa conférence de presse (voir la vidéo qui coiffe ce billet) et menacé par Spicer d'être expulsé du prochain point de presse de son patron.

Et qu'a fait BuzzFeed? Le site a publié les 35 pages du dossier avec toutes ses allégations non corroborées, ce qu'aucun des nombreux médias ayant reçu le même document cet automne n'avait voulu faire. Il s'agit d'une décision controversée qui a permis au père des «fausses nouvelles», Donald Trump, de mener un assaut malhonnête contre CNN et de détourner l'attention du public de problèmes sérieux, incluant la nature des liens de son équipe et de son entreprise avec la Russie, la question de ses conflits d'intérêts et son refus de publier ses feuilles d'impôts.

P.S. : Le New York Times publie un article intéressant sur Christopher Steele, l'ex-agent des services de renseignement britanniques, et son rôle dans cette affaire qui a pour origine le désir d'un riche bailleur de fonds républicain de monter un dossier contre Donald Trump.