Une Écosse indépendante? C'est un scénario désormais possible avec la spectaculaire victoire de l'indépendantiste Alex Salmond aux élections nationales. Aux commandes d'un gouvernement majoritaire, le premier ministre écossais a enfin la voie libre pour tenir un référendum. Portrait d'un guerrier patient.

Les derniers jours, Alex Salmond a été comparé à un sorcier, un superhéros et un sauveur. Contre toute attente, le premier ministre écossais et ses troupes ont remporté la majorité au Parlement d'Édimbourg, aux élections du 5 mai dernier. La déferlante jaune, couleur du parti indépendantiste du SNP, fut la plus écrasante de l'histoire de la politique écossaise.

Alex Salmond et les ultras du Scottish National Party ne s'y attendaient pas. Les analystes, encore moins. Dans le système électoral écossais, plus proportionnel que le système majoritaire britannique et canadien, remporter une majorité des 129 sièges parlementaires relève de l'exploit.

La veille des élections, une compilation des sondages prédisait un second gouvernement minoritaire au SNP, avec une victoire dans 59 circonscriptions. Le parti de Salmond en a finalement raflé 10 de plus.

«C'est un triomphe pour une nation, a affirmé un Alex Salmond rayonnant, au lendemain du scrutin. Nous regardons vers l'avenir et les rêves qui sont à notre portée.»

C'est aussi le couronnement d'une carrière marquée par des hauts et des bas vertigineux pour le brillant politicien de 56 ans.

Le come back kid

Économiste de formation, Alex Salmond a réalisé son premier coup d'éclat en interrompant le discours du budget en 1988 en s'écriant: «Ce budget est obscène!» Député depuis seulement un an au Parlement britannique, il est banni de la Chambre des communes pendant une semaine.

«C'était un geste calculé qui a attiré l'attention de tout le royaume sur la cause indépendantiste», explique à La Presse James Mitchell, professeur à l'Université de Strathclyde.

Il s'empare des rênes du SNP, encore marginal, pour la première fois en 1990. Persuasif, il convainc l'acteur Sean Connery de prêter sa voix à une publicité partisane. Ce sera le début d'une longue amitié avec l'ancien James Bond.

Alex Salmond, marié avec la discrète Moira McGlashan, de 17 ans son aînée, fait élire six candidats aux élections de 1997, avant de tirer sa révérence trois ans plus tard.

Après la démission de son successeur, John Swinney, il reprend son bâton de pèlerin et mène le SNP, fondé en 1934, à sa première victoire électorale en 2007.

Et maintenant, cette majorité aux élections du 5 mai.

Un référendum d'ici 2015

«On ne transforme pas un mouvement moribond en parti dominant sans un excellent flair politique, dit le politologue James Mitchell. Un ancien ministre anglais m'a déjà confié que le politicien écossais aurait été accueilli à bras ouverts dans n'importe quel parti à Londres.»

Au lieu de cela, la coalition menée par David Cameron doit se préparer à un référendum écossais, promis d'ici 2015 par Alex Salmond.

Le premier ministre britannique a dit qu'il ne s'opposerait pas à la victoire d'un «oui». Environ un Écossais sur quatre appuie le projet de souveraineté. Mais le débat ne fait que commencer.

«Il faudra s'entendre sur le terme indépendance, précise James Mitchell. Chose certaine, les Écossais sont sous le charme d'un optimiste invétéré nommé Alex Salmond.