Après avoir multiplié les déclarations de fermeté, le gouvernement français s'est finalement résigné à lâcher du lest hier pour tenter de ramener le calme en Guadeloupe, frappé par une vague de violence.

Le premier ministre François Fillon a déclaré en matinée qu'un dispositif avait été trouvé avec les organisations patronales locales pour majorer pendant deux ans les bas salaires de «près de 200 euros» (300$) par mois.

 

Il a précisé lors d'une période de questions au Sénat que cette bonification salariale s'appliquerait «naturellement» aux autres départements outre-mer (Martinique, Guyane, île de la Réunion), aussi touchés par des troubles.

Le leader du collectif qui paralyse l'activité économique de la Guadeloupe depuis un mois, Élie Domata, a réagi avec «méfiance» à l'annonce gouvernementale, soulignant qu'il attendrait «les explications» de Paris.

Il a déploré que cette ouverture survienne après 30 jours de mobilisation et la mort d'un militant syndicaliste abattu dans la nuit de mardi à mercredi, présumément par des jeunes armés.

Les violences avaient continué dans la nuit de mercredi à hier, les autorités signalant une trentaine d'arrestations et plusieurs commerces brûlés.

Le président Nicolas Sarkozy, soucieux de calmer les esprits, a reçu hier une délégation d'élus des départements d'outre-mer. Il a ensuite prononcé une courte allocution radio à l'attention des populations touchées par ce qu'il décrit comme une «certaine forme de désespérance».

États généraux

Le chef de l'État a promis qu'il se rendrait dans les Antilles quand «le calme serait revenu» pour lancer une série d'états généraux visant à traiter des «grands enjeux» touchant ces territoires.

Plus tôt dans la journée, la leader socialiste, Martine Aubry, avait invité «solennellement» le président à se rendre dans les départements d'outre-mer «pour mieux écouter et agir». Elle a prévenu qu'un mouvement de contestation similaire à celui qui touche la Guadeloupe pourrait survenir dans l'Hexagone.

L'Élysée et les différents représentants du gouvernement répètent à qui veut l'entendre que la situation dans les départements d'outre-mer n'a strictement rien à voir avec celle qui prévaut en métropole.

Il y a là-bas «un problème social, historique, identitaire», a notamment souligné un conseiller du président, évoquant, sans le nommer, le passé colonial de ces départements et les aspirations autonomistes qui y perdurent.

Un collectif d'intellectuels antillais favorables aux manifestations relevait il y a quelques jours dans une lettre ouverte que le conflit illustre le «souffrant désir» des populations locales «de faire peuple et nation, d'entrée en dignité sur la grande scène du monde...»