C’est avec l’impression d’avoir passé près de deux heures assis entre deux chaises – ce qui n’est pas des plus confortables – que l’on émerge d’Abraham Lincoln: Vampire Hunter de Timur Bekmambetov (Wanted).







Si le réalisateur russe renoue ici avec les vampires (ils étaient omniprésents et terriblement originaux dans les formidables Nightwatch et Daywatch qu’il a créés dans son pays natal), il le fait ici sur un scénario de Seth Grahame-Smith qui a adapté son propre roman, lequel est un mélange des genres très particulier où l’histoire (celle d’Abraham Lincoln) rencontre l’horreur (portée par les vampires).

Mais attention: on oublie la série B amusante et amusée de ces films des années 60 tels Jesse James Meets Frankenstein’s Daughter ou Billy the Kid vs. Dracula. Nous sommes ici dans un film à gros budget, en 3D, où le récit est traité très sérieusement. Un tel traitement narratif fonctionne très bien sur papier. Ce n’est pas le cas à l’écran, où l’hybride marche mieux quand il s’accompagne de clins d’œil. Ici, c’est comme si on avait remplacé Indiana Jones par Franklin D. Roosevelt dans Raiders of the Lost Ark, et enlevé l’humour et l’ironie du scénario.

Ainsi, quand on rit des exploits d’Abraham maniant la hache pour décapiter les vampires qui lui ont enlevé sa mère (c’est la raison pour laquelle il part en guerre contre eux) et veulent, des décennies plus tard, mettre leurs sales pattes sur son pays bien-aimé (nous sommes alors au temps de la guerre de Sécession), on rit en ne sachant pas trop si tel est le but recherché. Le fait que Timur Bekmambetov soit plus à l’aise dans les scènes d’action que dans la direction d’acteurs n’est pas étranger à cette perplexité.

Ainsi, il offre des scènes à grand déploiement superbement chorégraphiées (la poursuite entre les chevaux sauvages, la lutte sans merci sur le train), bien que, par moments, difficiles à «lire» (le 3D, ici, n’aide pas); et des bagarres entre humains et vampires assez impressionnantes. Mais si Benjamin Walker est très à l’aise dans la peau de Lincoln et convaincant dans ses scènes avec les morts-vivants alliés ou adversaires (Dominic Cooper en mentor, Rufus Sewell en ennemi juré), ses échanges chargés d’émotions, ceux qui se veulent dramatiques et ancrés dans la réalité, avec sa femme (Mary Elizabeth Winstead) par exemple, ne passent pas la rampe dans ce contexte. D’autant plus que les maquillages et les perruques, nécessaires puisque le temps passe pour les humains, se présentent avec différents degrés de… réussite, disons.

Bref, en mode horreur ici et historique là, hybride sur le long cours, Abraham Lincoln: Vampire Hunter n’est convaincant dans aucune de ses facettes.

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ABRAHAM LINCOLN: VAMPIRE HUNTER (V.F.: ABRAHAM LINCOLN: CHASSEUR DE VAMPIRES). Drame fantastique de Timur Bekmambetov. Avec Benjamin Walker, Dominic Cooper, Mary Elizabeth Winstead. 1 h 45.