(Toronto) Lorsque Ron Leshem, le producteur exécutif de la populaire série télévisée Euphoria, a réfléchi au lieu où présenter sa nouvelle série Bad Boy, un drame israélien sur les prisons pour mineurs, il a décidé de jeter son dévolu sur le festival du film de Toronto.

« Normalement, nous aurions choisi un festival de télévision. Mais nous avons considéré que cette série était une création cinématographique et qu’elle avait besoin d’un festival du film », a expliqué M. Leshem lors d’un entretien avec l’AFP.

Ce raisonnement, lui et la cocréatrice de Bad Boy Hagar Ben-Asher, ne sont pas les seuls à l’avoir eu. Le Festival international du film de Toronto (TIFF), qui a servi de plateforme de lancement pour de nombreux films oscarisés, se distingue aussi désormais comme un tremplin pour la télévision de prestige, comme en témoigne sa programmation en 2023.

Netflix y a dévoilé le premier épisode de sa minisérie très attendue All the Light We Cannot See, une épopée de la Seconde Guerre mondiale basée sur le roman Toute la lumière que nous ne pouvons voir d’Anthony Doerr et mettant en scène Mark Ruffalo.

La chaîne Prime Video d’Amazon a également présenté Expats, un drame se déroulant à Hong Kong et explorant les vies entrelacées des expatriés riches et pauvres de la ville, avec l’actrice oscarisée Nicole Kidman.

Selon le patron du TIFF Cameron Bailey, cet élargissement de la programmation est le résultat de « la croissance des séries et de la véritable intégration entre ceux qui réalisent des séries et ceux qui réalisent des films de cinéma ».

Des séries « qui voyagent facilement »

Bad Boy, qui se cherche encore un diffuseur à Toronto, se penche sur l’histoire vraie et surréaliste de l’humoriste israélien Daniel Chen, incarcéré dans un centre de détention pour mineurs lorsqu’il était enfant.

La série tournée en hébreu montre que les secrets de son passé, 20 ans plus tard, constituent un fardeau et une menace constante.

Comme l’expliquent Leshem et Ben-Asher, l’adolescent, alors connu sous le nom de Dean, a appris à se servir de l’humour pour survivre derrière les barreaux.

« Ce n’est pas une histoire sombre. C’est l’histoire d’un gars dont le talent s’est révélé dans un endroit très, très dur », déclare à l’AFP Mme Ben-Asher.

M. Leshem explique qu’ils ont rejeté dès le départ l’offre d’un studio américain de réaliser Bad Boy en anglais. « Nous voulions avoir la liberté de le faire de la manière la plus authentique possible ».

Les sous-titres ne sonnent plus le glas des séries télévisées : le succès mondial de séries comme Narcos et Squid Game témoigne du fait que le public n’a pas peur de consommer du contenu dans une autre langue que la sienne.

« C’est la force de la télévision aujourd’hui. Des histoires différentes peuvent voyager facilement », estime Mme Ben-Asher.

All the Light We Cannot See, qui sera diffusé sur Netflix le 2 novembre, raconte l’histoire d’une jeune fille française aveugle et d’un jeune soldat allemand dont les vies s’entrechoquent dans la ville française occupée de Saint-Malo, et sous les bombes.

La réalisatrice Lulu Wang, connue pour son film L’adieu, a choisi de dévoiler l’avant-dernier épisode d’Expats plutôt que le premier, estimant qu’il y avait « plusieurs voies possibles pour aborder une histoire ».

Dans la série tirée du roman The Expatriates de Janice Y. K. Lee, Nicole Kidman joue le rôle d’une mère américaine qui vit une tragédie familiale.

La diffusion d’Expats est prévue pour 2024 sur Prime Video.

Nicole Kidman et Mark Ruffalo n’ont pas assisté aux premières, les acteurs et scénaristes d’Hollywood étant toujours en grève.