Le Seuil a annoncé lundi qu'il renonçait à publier le livre sur le Maroc des journalistes Éric Laurent et Catherine Graciet, arguant que «la relation de confiance» entre l'éditeur et les auteurs était «de facto dissoute».

«Dans ces conditions, la publication envisagée ne saurait avoir lieu», indique la maison d'édition dans un communiqué. Éric Laurent et Catherine Graciet sont soupçonnés d'avoir tenté de monnayer l'abandon d'un projet de livre sur le roi du Maroc Mohammed VI contenant des informations supposées gênantes.

«Catherine Graciet et Éric Laurent ont publiquement reconnu avoir accepté de ne plus rien écrire sur le royaume du Maroc contre rémunération, violant ainsi délibérément les engagements contractuels qu'ils avaient pris avec les Éditions du Seuil», a expliqué la maison d'édition.

«La relation de confiance nécessaire à la publication des oeuvres de création, relation qui unit l'éditeur, ses auteurs et les lecteurs dans un même pacte, s'en trouve de facto dissoute», poursuit l'éditeur.

Les deux journalistes ont été mis en examen samedi pour chantage et extorsion de fonds. Ils se sont engagés par écrit à «''ne plus rien écrire'' sur le roi du Maroc», en échange de deux millions d'euros.

Dans un entretien par téléphone avec l'AFP, le président de la maison d'édition, Olivier Bétourné, a fait part de sa «stupeur, de sa tristesse et de sa colère».

«D'abord, je n'ai pas cru que les deux auteurs que j'avais publié (pour leur précédent ouvrage Le roi prédateur, ndlr) et que je me proposais de publier à nouveau étaient susceptibles de s'engager à ne pas honorer le contrat qu'ils avaient signé avec moi contre rémunération», a-t-il dit.

Et puis sont venues «la tristesse et la colère», a-t-il ajouté, dénonçant «un coup de canif» dans le contrat de confiance entre les auteurs et l'éditeur.

«Sans la confiance, rien n'est possible», a insisté M. Bétourné. «L'acte» des deux journalistes qui se sont engagés par écrit à ne plus rien écrire sur le roi du Maroc contre rémunération «est inqualifiable», a-t-il affirmé.

M. Bétourné a précisé que le manuscrit des deux journalistes était attendu «fin octobre». L'éditeur avait indiqué précédemment qu'il envisageait «une sortie en janvier/février».

«Il appartient à l'instruction, et à elle seule, de faire la lumière sur les charges pesant sur les deux auteurs, et notamment les imputations de chantage et d'extorsion de fonds, dont ils font l'objet. La présomption d'innocence s'impose à tous», rappelle Le Seuil dans son communiqué.