Nicholas Giguère pratique une littérature conceptuelle. Au contraire de bien des artistes visuels, toutefois, ce n’est pas pour se mettre au service d’une idée, aussi forte soit-elle, qu’il écrit. À travers l’autre, le romancier-poète dévoile tout, ses fantasmes, ses envies, ses joies et ses désillusions. Il se retrouve dans l’altérité.

Il ne pouvait trouver meilleur creuset poétique, vaste et arborescent, que dans la vie et l’œuvre de David Bowie. Cette communion donne un très long recueil que l’on peut ouvrir à peu près à n’importe quelle page afin d’être surpris, amusé, touché, secoué. On y retrouve Bowie, bien sûr, des albums Space Oddity à Scary Monsters, mais surtout l’auteur curieux, espiègle et provocateur de Queues et Petites annonces.

La compréhension du monde de l’écrivain fascine. Elle passe autant par la culture populaire que la plus pointue, de James Bond et Jojo Savard à David Lynch, Talking Heads et Denis Diderot. Et il ne s’agit pas de références gratuites dans cet univers phosphorescent. La vie du poète habite chacun des vers, en chair et en os, avec ses imprévus, même si cela paraît insensé.

Parce que le corps exulte la plupart du temps, il s’efforce et s’épuise. Le poète aime et déteste quelque part entre le rock et le génocide. Il assume tous les contrastes, toutes les déchéances et les victoires. Les poèmes sont admirablement courts, mais tout aussi explosifs les uns que les autres.

Dans un aussi long périple, on pardonnera les facilités de certains titres puisqu’avec sa superbe, Nicholas Giguère sait relancer constamment sa quête.

« Je serai l’espoir/de lancer la planète/contre une météorite brillante/je serai le vide créé/par les affres/de la liberté ».

Freak Out in a Moonage Daydream

Freak Out in a Moonage Daydream

Le Quartanier

312 pages

7/10