Trois ans après La boîte de Pandore, Bernard Werber relance les aventures de René Toledano, spécialiste de la réincarnation, avec La prophétie des abeilles. Dans ce nouveau livre, ses héros explorent leurs vies antérieures pour contrer une famine mondiale causée par la disparition suspecte des abeilles. Entrevue.

Pourquoi avoir attendu si longtemps pour la suite des aventures de René Toledano ?

La boîte de Pandore n’a pas eu un retentissement aussi fort et on me demandait des suites de Demain les chats. J’ai préféré terminer la trilogie des chats pour répondre aux demandes des lecteurs. La réincarnation est un sujet qui me passionne. La première fois que j’ai eu accès à mes vies antérieures a été extraordinaire. C’est comme si j’avais une porte dans ma tête me donnant accès à plein d’histoires. J’ai énormément de détails avec l’hypnose régressive, beaucoup plus que dans un rêve.

Vous souvenez-vous de tout avec l’hypnose ? On oublie rapidement les rêves si on ne les note pas.

Dans le rêve, il y a une certaine incohérence, mais l’hypnose régressive a une grande cohérence. On appréhende nos vies antérieures avec les cinq sens de manière logique.

Êtes-vous absolument certain que vous avez vécu des vies antérieures ?

Non, on ne peut pas être certain. J’ai une formation de journaliste scientifique. Ça me pousse à être curieux de tout, notamment des vies antérieures. C’est comme si j’observais les étoiles au microscope. Je n’ai jamais adhéré à la notion de croyance ou de foi, depuis que je suis né je ne suis sûr de rien. Par contre, j’aime bien le concept de réincarnation comme source d’inspiration romanesque.

Pourquoi parler des abeilles ?

Comme romancier, je peux montrer que des choses qui se passent de nos jours ont des conséquences dans le futur. Je parle de ce qui me semble un futur potentiel pour l’année 2051. Je pars de tendances, par exemple le réchauffement et la croissance démographique. On nous parle aussi de la disparition des abeilles, considérée comme un phénomène anodin. Je me dis que c’est peut-être très grave, que la survie de l’espèce humaine en dépend à cause du rôle des abeilles dans l’agriculture. C’est un sujet vraiment urgent. En France, il y a un débat sur les néonicotinoïdes, ces pesticides qui tuent les abeilles. […] Il se peut que bientôt le vrai miel soit difficile à trouver. C’est dommage, je trouve cet aliment parfait.

Le monde que vous décrivez compte 15 milliards d’habitants. Or, les prévisions sont plutôt d’un pic de population autour de 10 milliards d’ici 2100.

J’en ai vu, des spécialistes se tromper. Moi, j’ai vu une chose, en 1961 quand je suis né, il y avait 2 milliards d’individus sur Terre, maintenant, 60 ans plus tard, il y en a 8. Je crois que les experts ne connaissent rien en général. Je n’ai pas besoin de rien prouver et je ne crois pas qu’en Inde, en Afrique ou en Chine, il y a un ralentissement de la croissance démographique.

Vous donnez aussi beaucoup de place au judaïsme.

Surtout le temple de Salomon, qui est la clef de toutes les spiritualités occidentales. J’ai essayé de comprendre la source de ce rayonnement. Le judaïsme était lui-même à l’époque, 1000 ans avant Jésus-Christ, un peu diversifié, il s’est unifié avec l’exil à Babylone. Le peuple d’Israël était alors fascinant. Les spiritualités me fascinent.

Dans les remerciements, vous évoquez un séjour dans un kibboutz. Était-ce l’un des voyages organisés pour les jeunes Juifs par l’État hébreu ?

Ça n’a aucun rapport avec mes origines juives. Je voulais vivre dans un village sans argent, savoir comment on pourrait vivre de manière moins égoïste, privilégier l’intérêt collectif plutôt qu’individuel. C’est comme les abeilles, c’est une collectivité qui fonctionne.

En ces temps de pandémie, on a beaucoup dénoncé les scientifiques ayant des points de vue controversés. Pensez-vous qu’il faut toujours laisser la chance de s'exprimer aux scientifiques iconoclastes sur la base que, parfois, la majorité se trompe ?

J’ai été journaliste scientifique pendant sept ans. Sur n’importe quel sujet, il y a des points de vue contradictoires. J’ai pris l’habitude de me fier à mon intuition. Avec la COVID-19, j’ai l’intuition d’écouter. Et j’ai l’intuition qu’il me manque des informations en provenance de Chine, vu qu’il n’y a pas de démocratie dans ce pays, donc on n’a pas pu y enquêter sur l’origine du virus. Quant aux traitements, si on ne fait rien, on n’avance pas. Mais je comprends les politiciens, il faut faire des choix.

La prophétie des abeilles

La prophétie des abeilles

Albin Michel

420 pages

6/10