Donner un sens à sa vie et aux épreuves qu’on traverse. C’est l’idée à l’origine de la logothérapie, une approche inventée par le psychiatre autrichien Viktor E. Frankl, survivant des camps nazis. Il a raconté son expérience dans Man’s Search for Meaning, publié pour la première fois en 1959 et devenu un best-seller international depuis. Deux rééditions des livres de Frankl paraissent ces jours-ci et elles pourraient peut-être vous donner des outils pour mieux traverser le confinement et la pandémie.

Qui est Viktor E. Frankl ?

Né au début du XXe siècle en Autriche, une cinquantaine d’année après Sigmund Freud, Viktor E. Frankl était un neurologue et psychiatre qui enseignait à la faculté de médecine de l’Université de Vienne. Durant ses études, il s’est particulièrement intéressé à la dépression et au suicide. Durant la Seconde Guerre mondiale, il a été fait prisonnier des nazis avec sa famille. Ses parents, son frère, sa sœur et lui ont d’abord été envoyés au camp de Theresienstadt, où son père est mort. Durant les trois années où il a été emprisonné, Viktor E. Frankl a vécu dans quatre camps, dont celui d’Auschwitz, où sa mère et son frère ont péri. La femme de Frankl, elle, est morte au camp de Bergen-Belsen. Il a appris tout cela lorsqu’il a pu quitter le camp.

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Viktor E. Frankl en 1965

Une fois libéré (sa sœur est la seule autre survivante de la famille), Frankl a poursuivi sa carrière, fait un doctorat en philosophie et publié 39 livres en plus de prononcer des conférences. Il s’est également remarié et a eu un enfant. Il est mort en 1997 à l’âge de 92 ans.

Qu’est-ce que la logothérapie ?

La logothérapie, comme la psychanalyse, est une forme de thérapie. Elle est axée sur le sens qu’un individu donne à sa vie ainsi que sur ses ressources spirituelles. Inspiré des travaux du philosophe Kierkegaard, Frankl a inventé cette approche en 1926, mais c’est véritablement dans les camps de concentration qu’il a pu mettre à l’épreuve ses théories. Il a entre autres constaté que les prisonniers qui ne pouvaient pas s’accrocher à un espoir mouraient en premier, et ce, même s’ils étaient en meilleure condition physique. Ceux qui étaient capables d’aller puiser dans leurs souvenirs positifs, ou qui avaient une riche vie intérieure, s’en tiraient mieux. La logothérapie est considérée comme la troisième école de psychothérapie de Vienne après celle de Freud et d’Adler.

Comment le DFrankl a-t-il appliqué la logothérapie lorsqu’il était prisonnier ?

Quand le seul but d’un individu est de rester en vie, il faut donner du sens à cette vie, croyait Viktor E. Frankl. Quand il l’a pu, il a organisé des séances de thérapie collective durant lesquelles il répétait sensiblement les mêmes choses à ses camarades de camp : votre seule liberté, c’est de pouvoir vous échapper mentalement de votre environnement. Pour ce faire, il conseillait aux prisonniers de penser à l’avenir après les camps, de se visualiser en train de faire quelque chose de positif : travailler, vivre avec l’être aimé, pratiquer une activité. Avec un de ses compagnons, Frankl s’obligeait tous les jours à inventer une histoire drôle qui se passait dans l’avenir. Il disait que l’espoir stimulait le système immunitaire. Il disait aussi qu’en plus de donner un sens à sa vie, il fallait réussir à donner un sens à sa souffrance. Cessez d’attendre quelque chose de la vie et dites-vous que c’est la vie qui attend quelque chose de vous, aimait-il rappeler. Frankl suggérait aux prisonniers d’imaginer qu’une personne qu’ils aimaient les observait. Il croyait que cela pouvait les motiver à affronter les épreuves avec dignité afin que ces personnes soient fières d’eux.

Comment appliquer la logothérapie dans nos vies ?

Bien évidemment, il n’est pas question de comparer l’expérience de confinement pendant la pandémie à l’expérience des camps de concentration. Mais Frankl le disait lui-même, l’approche de la logothérapie peut s’appliquer à différentes expériences traumatisantes comme la prison, mais aussi le deuil, la maladie ou la séparation. Le lecteur trouvera donc plusieurs exemples dans Découvrir un sens à sa vie, un ouvrage bouleversant dans lequel Frankl raconte son expérience dans les camps, ainsi que dans Oui à la vie, dans lequel on retrouve trois conférences qu’il a prononcées en 1946. Le psychiatre insiste sur l’importance de donner un sens aux moments du quotidien afin de ne pas sombrer dans l’apathie ou l’amertume. Il recommande aussi de donner un sens à son travail ou de s’investir dans un projet artistique qui fait appel à la créativité. On peut également insuffler du sens à une relation significative ou à une expérience. En d’autres mots, si on n’a pas choisi de vivre une expérience traumatisante, on est toujours libre de choisir la façon dont on va y répondre.

IMAGE FOURNIE PAR LES ÉDITIONS DE L’HOMME

Découvrir un sens à sa vie grâce à la logothérapie, de Viktor E. Frankl

Découvrir un sens à sa vie grâce à la logothérapie
Viktor E. Frankl, traduit de l’anglais par Clifford J. Bacon et Louise Drolet
Les éditions de l’Homme
144 pages

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Oui à la vie – Découvrir un sens à l’existence malgré les souffrances, de Viktor E. Frankl

Oui à la vie : Découvrir un sens à l’existence malgré les souffrances
Viktor E. Frankl, traduit de l’anglais par Louise Sasseville
Les éditions de l’Homme
160 pages