Traduire directement entre des dizaines de langues, créer son propre univers virtuel avec de simples commandes vocales, amener l’intelligence artificielle (IA) à des sommets encore insoupçonnés. Ce sont essentiellement les promesses pour le « métavers » que le PDG de Meta et fondateur de Facebook, Mark Zuckerberg, a présentées mercredi lors d’un évènement de plus de 2 h 30 min.

Le cœur des ambitions de Meta, nouveau nom de Facebook, pour son monde virtuel immersif, c’est le développement de l’intelligence artificielle. Deux sommités montréalaises ont d’ailleurs participé à cette présentation : Joëlle Pineau, professeure à l’Université McGill et codirectrice de Facebook AI Research, ainsi que Yoshua Bengio, professeur titulaire à l’Université de Montréal.

Construire un monde

« Le type d’expériences que vous allez vivre dans le métavers est au-delà de ce qui est possible aujourd’hui, a annoncé d’entrée de jeu Mark Zuckerberg. C’est une version immersive de l’internet : au lieu de simplement regarder quelque chose à l’écran, vous allez vous sentir comme si vous étiez à l’intérieur ou présent avec une autre personne. »

Le PDG de Meta y est allé d’une démonstration, une des premières montrant clairement ce que pourrait être ce métavers. Un outil appelé Builder Bot permet à deux amis, représentés par leur avatar, de se retrouver dans un monde virtuel totalement vierge.

Le narrateur, Mark Zuckerberg, annonce : « Allons au parc », et un décor verdoyant apparaît. Il demande ensuite d’aller à la plage, d’ajouter une île au milieu de l’océan au loin, d’y mettre des nuages, une table, une chaîne stéréo, des sons de vagues et des goélands. Pour conclure le tout, le narrateur demande un peu de musique tropicale, qui joue instantanément.

« Pas mal, hein ? a renchéri M. Zuckerberg. Alors que nous allons faire évoluer cette technologie, vous serez capable de créer des mondes nuancés à explorer et partager des expériences avec les autres, tout simplement par la voix. Mais il y a beaucoup de défis que nous devons surmonter pour y arriver. »

« Superpouvoir » en gestation

Tous ces défis relèvent essentiellement de l’intelligence artificielle, avec laquelle on veut d’abord considérablement améliorer les outils de traduction.

On a annoncé un des projets les plus ambitieux de Meta, soit un « traducteur de discours universel » capable de gérer des dizaines de langues.

Au total, a-t-on précisé, on travaille sur quelque 10 000 combinaisons entre différentes langues, pour passer directement de l’une à l’autre plutôt que de transiter par l’anglais comme c’est le cas actuellement.

« L’habileté de communiquer avec n’importe qui dans n’importe quelle langue, c’est un superpouvoir dont on rêve depuis toujours, et que l’IA va nous livrer au cours de notre vie », a annoncé M. Zuckerberg. Ce programme a été baptisé « Aucune langue laissée pour compte » (« No language left behind »).

La méthode privilégiée pour ces avancées, qui offre un potentiel plutôt impressionnant si on se fie aux résultats des chercheurs, c’est celle de « l’apprentissage auto-supervisé ». On laisse essentiellement l’IA faire ses propres expériences plutôt que de lui soumettre des millions de comparaisons étiquetées par des humains. L’image évoquée : celle d’un enfant s’amusant avec des blocs plutôt que planté devant un écran de télévision.

La chercheuse montréalaise Joëlle Pineau l’a notamment présentée avec des bras robotisés capables d’apprendre par eux-mêmes à manipuler des objets. « On peut apprendre le sens du toucher à une IA, a-t-elle expliqué, créer des modèles qui vont opérer dans le vrai monde comme dans le monde virtuel. »

SAISIE D’ÉCRAN LA PRESSE

La chercheuse montréalaise Joëlle Pineau a présenté une IA commandant des bras robotisés capables d’apprendre par eux-mêmes à manipuler des objets.

Écueils éthiques

Mais comme l’a rappelé Yoshua Bengio, « on est encore loin d’une IA qui atteint le niveau de l’humain. Il y a des problèmes dans lesquels les humains sont bons, mais pas les machines ». Un de ces grands défis, a-t-on rappelé à plusieurs reprises lors de cette présentation, est de concevoir des intelligences artificielles éthiques et sans biais. La protection de la vie privée, un sujet qui a plongé Facebook dans la controverse depuis des années, a également été évoquée.

« Nous nous engageons à construire de façon transparente et responsable, a promis Mark Zuckerberg. Nous avons l’occasion de construire un environnement numérique plus sécuritaire et meilleur pour nous tous. Ce qui signifie créer des technologies basées sur l’intelligence artificielle qui assurent les plus hauts niveaux de confidentialité et aident à prévenir les torts. »