Alors que ses concurrents Bell et Rogers misent respectivement sur Nokia et Ericsson pour le développement de leur réseau 5G, Telus persiste et signe : c’est avec Huawei qu’elle entreprendra la mise sur pied de son réseau dès cette année.

« Telus amorcera la mise en place de son réseau 5G sous peu, et son module initial sera fourni par Huawei, précise l’entreprise dans un courriel envoyé à La Presse. Le processus de demande de propositions concernant le réseau 5G est en cours et nous continuons d’envisager une diversification des fournisseurs. »

En attente du fédéral 

Une part importante du réseau actuel LTE de Telus, tout comme de celui de Bell, repose sur des équipements fournis ces dernières années par Huawei. « Puisque les composants technologiques et de réseau 5G et 4G sont interopérables, il est tout naturel que nous tirions parti de notre écosystème de fournisseurs 4G, tout en continuant de collaborer avec le gouvernement canadien », explique Telus. 

Le gouvernement fédéral n’a toujours pas décidé s’il allait autoriser les fournisseurs canadiens à utiliser les équipements de Huawei. L’entreprise chinoise, accusée d’être trop proche du Parti communiste, fait l’objet d’un boycottage des États-Unis depuis mai dernier. L’Australie, le Japon, Taiwan et la Nouvelle-Zélande leur ont emboîté le pas, et Huawei fait l’objet de « tests de sécurité » au Canada depuis 2013. 

« Nous allons continuer à travailler avec le gouvernement pour nous assurer que nous respectons toutes les normes, mais nous ne voyons rien pour nous ralentir à ce stade », avait déclaré plus tôt dans la journée le chef de la direction financière de Telus, Doug French, dans une entrevue au Financial Post.

« Modèle canadien » 

Huawei a toujours nié fournir des informations au gouvernement chinois. L’entreprise a assuré par courriel à La Presse travailler « ouvertement et dans la transparence avec le gouvernement canadien, et [avoir] opéré pendant dix ans à la grandeur du pays sans un seul incident ou brèche de sécurité ». 

Huawei sera le fournisseur de Telus pour les équipements d’accès radio 5G – les antennes, essentiellement –, mais ne sera pas l’architecte des infrastructures au cœur du réseau, a précisé M. French. 

« Dans le modèle canadien, il convient de noter que l’équipement de Huawei est restreint au réseau d’accès radio, une partie non confidentielle de notre infrastructure, explique », Telus par écrit.

Cette approche est tout à fait conforme aux exigences réglementaires et de cybersécurité actuelles au Canada, lesquelles ont été mises en place et approuvées par les gouvernements fédéraux qui se sont succédé depuis plus d’une décennie.

Telus 

C’est ce « modèle », soutient Telus, qui a été adopté par de nombreux pays dans le monde, notamment l’Allemagne et, plus récemment, le Royaume-Uni. La semaine dernière, Bell a annoncé qu’elle recourrait aux équipements de Nokia comme « premier fournisseur », mais a précisé qu’elle pourrait également faire affaire avec Huawei.

Enchères à venir 

La prochaine étape, pour Telus comme pour les autres fournisseurs, ce sont les enchères que le gouvernement fédéral doit annoncer pour les fréquences moyennes, autour de 3,5 GHz, très recherchées pour la 5G. Elles ont notamment des capacités de transport de données supérieures à celles de la 4G tout en ayant une meilleure portée que les très hautes fréquences.

On s’attend à ce que ces enchères aient lieu à l’automne prochain, bien que leur date n’ait pas encore été confirmée. En mars dernier, les premières enchères au pays, visant les fréquences autour de 600 MHz, avaient rapporté 3,47 milliards au gouvernement pour l’attribution de 121 licences. 

Il n’existe pour l’instant aucun réseau 5G commercial au Canada. En plus de quelques projets pilotes, Rogers offre la 5G dans certains secteurs centraux de quatre villes canadiennes, dont Montréal, mais ce service est réservé à des testeurs sélectionnés.