Le redressement de Reitmans se poursuit, mais les investisseurs n’obtiennent pas encore tout ce qu’ils désirent, ce qui peut expliquer la volatilité de l’action du détaillant montréalais.

Le titre a perdu plus du quart de sa valeur vendredi à la Bourse de croissance dans un volume de transactions beaucoup plus élevé qu’en temps normal après le dévoilement d’une performance financière de fin d’exercice révélant une hausse des ventes, mais une baisse de rentabilité.

Après une poussée très forte de l’action en début d’année, suivie d’un repli, le titre avait progressé avec vigueur dans les dernières semaines.

En coulisses, on chuchote que des investisseurs espéraient une annonce entourant une migration de l’action à la cote du TSX ou le versement d’un dividende.

« Le titre doit [passer] à la Bourse de Toronto et nous ferons pression en ce sens », lance le gestionnaire de portefeuille Jesse Gamble, de la firme Gestion d’actifs Donville Kent.

Cet actionnaire de Reitmans ne croit cependant pas que l’entreprise devrait verser de dividende à ce stade-ci. « Pas encore », dit-il, mais elle devrait racheter des actions, ce qui serait extrêmement rentable au cours boursier actuel, selon lui.

De plus, elle devrait explorer des moyens de monétiser son parc immobilier, ajoute-t-il.

Une « tonne de liquidités »

Dans un rapport de recherche rédigé au cours de l’hiver, Jesse Gamble évaluait que le siège social de Reitmans, situé rue Sauvé, vaut 118 millions et que le centre de distribution du boulevard Henri-Bourassa vaut 123 millions. Il affirme que l’espace de bureaux est actuellement sous-utilisé et pense que la famille Reitman pourrait acheter les édifices pour ensuite louer les espaces à l’entreprise.

PHOTO JOSIE DESMARAIS, ARCHIVES LA PRESSE

Le siège social de Reitmans, rue Sauvé

« Cela permettrait aux investisseurs d’investir uniquement dans les activités de commerce de détail. »

Jesse Gamble note que les flux de trésorerie ont été très importants et que l’entreprise est maintenant assise sur une « tonne de liquidités ».

Il n’a pas été possible de parler à Stephen Reitman, le grand patron de l’entreprise. Il nous a toutefois fait parvenir quelques commentaires par courriel en mentionnant notamment que l’arrivée du titre au TSX « n’est actuellement pas prévue ».

Les activités de vente au détail sont cycliques et les positions de liquidités varient tout au long de l’année. L’entreprise continuera à investir dans ses magasins et dans sa technologie pour rester compétitive.

Stephen Reitman, grand patron de Reitmans, dans un courriel à La Presse

« Les bâtiments de la société sont essentiels à la réussite et au bon fonctionnement de nos activités. La valeur inhérente de nos actifs immobiliers en raison des conditions du marché ne modifie en rien notre volonté d’investir dans ces actifs pour améliorer et développer nos activités », précise M. Reitman.

Jesse Gamble déplore par ailleurs que Reitmans n’organise pas de présentations ni de conférences téléphoniques pour parler de l’entreprise, expliquer les résultats, et répondre aux questions des investisseurs. « Il n’y a même pas d’ouverture pour tenir des rencontres », souligne-t-il.

« Il y a beaucoup de valeur à réaliser s’ils se concentrent davantage sur les actionnaires. »

À ce sujet, Stephen Reitman indique que l’idée mérite d’être considérée et que la direction y réfléchit.

Risques de récession

La volatilité du titre peut aussi s’expliquer par des investisseurs qui vendent en anticipation d’une récession et de son impact potentiel sur le commerce de détail.

Jesse Gamble répond que Reitmans s’est bien comportée et est restée saine et rentable lors des récessions passées. Il va jusqu’à parler d’un effet de type « dollar store » en faisant référence à la résilience des magasins à prix réduits lorsque l’économie s’essouffle.

« Un investisseur peut se prémunir contre les risques de récession en vendant à découvert des actions de sociétés de vente au détail beaucoup plus chères et en s’exposant à un titre comme celui de Reitmans », dit Jesse Gamble.

Reitmans, qui avait fait appel à la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies en mai 2020 avant d’émerger de ce processus au début de l’année dernière, a dévoilé jeudi soir des ventes en hausse de 11 % sur un an à 212 millions pour les mois de novembre, décembre et janvier.

Malgré une augmentation de la marge brute, le bénéfice net des activités poursuivies a reculé de plus de 70 % à 27,5 millions durant le trimestre. Le recul de rentabilité est notamment attribué à des éléments ponctuels et une hausse des charges d’exploitation.