(New York) La Bourse de New York a terminé en baisse vendredi, à l’issue d’une semaine sens dessus dessous, les investisseurs étant toujours en alerte et méfiants avant le week-end.

Le Dow Jones s’est contracté de 1,19 %, l’indice NASDAQ a perdu 0,74 % et l’indice élargi S&P 500 a reculé de 1,10 %.

Pour Art Hogan, de B. Riley Wealth Management, la séance a été marquée par une forte aversion pour le risque, « car on ne sait pas ce qui pourrait se passer durant le week-end » sur le front des banques.

Première victime de ce climat, la banque régionale américaine First Republic, considérée comme le prochain maillon faible de la crise bancaire, qui a plongé de 33,00 %, après avoir rebondi de près de 10 % la veille.

L’annonce, jeudi, de l’injection de 30 milliards de dollars de dépôts par un groupe de onze grandes banques américaines dans les caisses de cet établissement californien n’aura assuré à son cours de Bourse qu’un soutien de courte durée.

En une semaine, First Republic a effacé 80 % de sa capitalisation boursière.

S’il a été le plus maltraité vendredi, FRC, son symbole boursier, a été accompagné dans la tourmente par d’autres banques régionales, notamment une autre californienne, PacWest (-18,95 %), ainsi que Western Alliance (-15,47 %), dont le siège est à Phoenix (Arizona), ou l’établissement texan Comerica (-8,44 %).

Si leur dérapage a été moins spectaculaire, les géants du secteur ont aussi subi un net repli. Membres éminents du Dow Jones, Goldman Sachs (-3,67 %) et JPMorgan Chase (-3,78) ont contribué à plomber l’indice phare de Wall Street.

« La volatilité qu’on a vue cette semaine a été remarquable », a commenté Christopher Low, de FHN Financial. « Et quand vous avez une telle volatilité, cela pousse les algorithmes à vendre. Ce n’est donc pas surprenant qu’on voit les gens retirer quelques jetons de la table avant le week-end. »

Pour ne rien arranger, vendredi était une journée dite des « quatre sorcières », qui correspond à l’arrivée à échéance de plusieurs milliers de milliards de dollars de produits dérivés basés sur des indices boursiers ou des actions individuelles.

Cette échéance renforce souvent la volatilité de Wall Street lors de la séance considérée.

Autre indicateur de l’anxiété des opérateurs et de leur appétit pour les actifs jugés sûrs, les prix des bons du Trésor américains sont montés en flèche, ce qui a fait baisser leurs taux, les deux évoluant en sens opposé.

Le rendement des emprunts d’État américains à 10 ans tombait à 3,43 %, contre 3,57 % la veille.

Pour autant, contre toute attente, le bitcoin caracolait (+7,34 %), bien qu’il soit théoriquement considéré comme un actif à risque. Il a tiré dans son sillage les valeurs liées au secteur des cryptomonnaies, telles le spécialiste du « minage » Riot Platforms (+14,89 %) ou la plateforme d’échanges Coinbase (+10,62 %).

Le NASDAQ s’en est mieux tiré que le Dow Jones, grâce à quelques méga-capitalisations, comme Alphabet (+1,38 %) et Microsoft (+1,17 %), toujours soutenues par les annonces des deux groupes sur l’intégration de l’intelligence artificielle à leurs produits.

Le constructeur chinois de véhicules électriques Xpeng a bondi (+6,12 %), malgré la publication d’une perte trimestrielle plus importante que prévu et d’un chiffre d’affaires inférieur aux attentes. Le groupe s’est néanmoins dit confiant dans le redémarrage de sa croissance.

Son concurrent Tesla a reculé (-2,17 %), de même que d’autres constructeurs de véhicules électriques comme Rivian (-3,34 %) ou Lucid (-1,17 %).

FedEx a paradé (+7,97 %), après avoir relevé ses prévisions pour l’ensemble de l’année, malgré une déception sur son chiffre d’affaires du troisième trimestre de son exercice décalé (de juin à mai). Le groupe s’attend à avoir réduit ses effectifs de 25 000 postes sur un an d’ici à fin mai.

Bourse de Toronto

La Bourse de Toronto a clôturé en baisse de plus de 150 points vendredi, pendant que les grands indices américains affichaient des pertes eux aussi, les investisseurs continuant d’être embêtés par une crise de confiance envers le système financier déclenchée par l’écroulement de deux banques américaines.

« Cette crise a été un peu un coup de poing pour le marché », a illustré Pierre-Benoît Gauthier, vice-président adjoint de la stratégie de placement chez IG Gestion de patrimoine.

L’indice composé S&P/TSX du parquet torontois a perdu 151,29 points pour terminer la journée avec 19 387,72 points. Il cumule un recul de près de 2 % sur l’ensemble de la semaine, essentiellement à cause de la baisse des cours du pétrole brut.

Les investisseurs ont afflué vers l’or, une valeur refuge historique, a noté M. Gauthier, et les prix de l’or ont augmenté de façon constante dans le chaos, approchant vendredi le cap des 2000 $ US.

Pendant ce temps, les investisseurs disposant d’un portefeuille diversifié ont été protégés contre des pertes importantes, alors que la corrélation entre les obligations et les actions s’est effondrée, a-t-il poursuivi.

Les actions ont baissé cette semaine, mais la valeur des titres à revenu fixe a augmenté, une différence marquée par rapport à l’année dernière, lorsque les deux types d’investissements montraient une faible performance, a souligné M. Gauthier.

Le marché a commencé à évaluer non seulement une décision plus accommodante de la Réserve fédérale, la semaine prochaine, mais également un potentiel de multiples baisses de taux dans un avenir proche, une différence significative par rapport à ce qu’il attendait il y a à peine une semaine.

« Plus tôt dans l’année, quand les gens s’attendaient à des baisses […] nous pensions que c’était excessif, a affirmé M. Gauthier. Mais maintenant, la situation a tellement changé. »

Le stratège a estimé qu’il était maintenant juste de croire que la Fed pourrait augmenter ses taux d’un quart de point de pourcentage la semaine prochaine, lors de la dernière hausse de son cycle de resserrement, ou même surprendre les investisseurs avec une pause.

« Nous attendons toujours 25 points de base, mais le marché est vraiment sur la clôture », a-t-il noté.

Quant aux réductions, il est trop tôt (et l’environnement est trop volatil) pour le dire, mais une chose est sûre : si la Fed réduit les taux en 2023, ce ne sera pas pour des raisons positives, a prévenu M. Gauthier.

« Cela signifiera que l’économie a été beaucoup plus faible que prévu », a-t-il affirmé.

Le potentiel de baisse des taux d’intérêt est une bonne nouvelle pour la technologie, et les investisseurs ont probablement pris des actions dans les grands titres technologiques en tant qu’investissements sûrs, a expliqué M. Gauthier.

« Pour les banques, ça a été une semaine infernale », a-t-il dit, mais pour d’autres entreprises et secteurs, c’est en fait le contraire, la confiance dans les taux d’intérêt ayant le dessus sur la peur.

« C’est un marché de sélectionneurs de titres, a déclaré M. Gauthier. Il y aura des gagnants et des perdants. »

Sur le marché des devises, le dollar canadien s’est négocié au cours moyen de 72,81 cents US, en baisse par rapport à celui de 72,76 cents US de jeudi.

Le prix de l’or a bondi de 50,50 $ US à 1973,50 $ US l’once et celui du cuivre s’est apprécié de 3 cents US à 3,89 $ US la livre.

La Presse Canadienne