L’effet de la baisse de taux s’est déjà fait sentir mercredi auprès d’un fournisseur de services hypothécaires en ligne, alors que des courtiers immobiliers ne s’attendent pas à revoir dès maintenant une grande effervescence dans les marchés.

Depuis un mois et demi, les clients de Ratehub, qui offre des services hypothécaires en ligne, attendaient l’annonce du 5 juin avant de contracter un prêt hypothécaire, raconte au téléphone Philippe Simard, directeur hypothécaire pour le Québec.

« Parce qu’il y avait beaucoup de supputations au niveau de l’annonce du mois de juin, analyse-t-il. Depuis qu’on a la confirmation, on s’attend à ce qu’il y ait plus de gens qui contractent un prêt hypothécaire, et c’est déjà commencé. En à peine une journée, trois de mes courtiers m’ont dit que les clients avec qui on parlait depuis un mois et demi sont revenus mercredi pour demander quel était l’effet de la baisse. »

Le taux directeur de la Banque du Canada a un effet direct sur les taux variables, rappelle Philippe Simard. Or, il y a encore beaucoup de gens qui pensent que l’effet est aussi direct sur les taux fixes, observe-t-il, alors que ce n’est pas le cas.

Marché immobilier

La liquidatrice d’une succession sur la Rive-Sud de Montréal raconte à La Presse qu’elle attendait une baisse de taux avant de mettre en vente la maison de son père mort en mars dernier.

« Je voulais prendre le temps de bien faire faire les choses et je me disais qu’une baisse de taux, combinée au RAP [régime d’accession à la propriété], qui est passé de 35 000 $ à 60 000 $ lors du dernier budget fédéral, allait sûrement aider à susciter de l’intérêt pour la maison familiale, dont le prix sera accessible aux premiers acheteurs », explique au téléphone la liquidatrice, qui ne veut pas que son nom soit mentionné afin d’éviter d’être encore plus sollicitée par des courtiers immobiliers qui veulent signer un contrat de courtage avec elle.

« Un quart de point n’est pas suffisant pour faire une différence marquée sur des budgets, mais ça change le ton », constate sur le terrain Marc Lefrançois, courtier immobilier agréé chez Royal LePage Tendance.

« Beaucoup de gens disaient : je ne touche pas au marché, parce que la Banque du Canada n’est pas rassurante du tout avec son discours sur l’inflation et les hausses possibles. Là, les statistiques des derniers mois ont changé et la Banque du Canada change complètement son discours. Le fait que les taux vont décroître redonne confiance à un pourcentage d’acquéreurs potentiels. »

Selon Marc Lefrançois, cette légère baisse de taux motivera les propriétaires de maison d’environ 600 000 $. Ces gens bien établis avec de bons emplois, qui rêvaient d’une propriété à 1 million plus grande et mieux située, s’étaient retirés du marché depuis un an et demi.

« Ceux qui veulent faire une mise à jour à la hausse recommencent à revenir dans le marché depuis l’anticipation des baisses de taux puis la confirmation maintenant que les taux devraient commencer à baisser », observe-t-il.

Martin Desfossés, courtier immobilier chez RE/MAX Bonjour, soutient de son côté que les courtiers et les acheteurs espéraient une diminution des taux plus marquée, parce que les transactions dans certaines régions du Québec sont au ralenti.

Cependant, si les premiers acheteurs n’avaient pas accès au marché avec des taux haussiers, le courtier envisage une compétition plus féroce dans les prochains mois.

« En diminuant les taux, ça aide les premiers acheteurs, mais ça aide aussi ceux qui ont déjà plus de capacité d’achat, explique Martin Desfossés. La compétition mettra une pression à la hausse sur les prix de vente et une pression sur les acheteurs par la force des choses. »