BRP lève le pied dans ses usines – surtout du côté de la motoneige – parce que ses véhicules récréatifs se vendent moins vite que pendant la pandémie. Ce ralentissement est ressenti jusqu’à Valcourt, en Estrie, où l’on aura besoin de 300 personnes « de moins » pour assembler des Ski-Doo cette année.

La minceur du tapis blanc a donné un important coup de frein sur les ventes de motoneiges depuis l’automne – environ 20 % au quatrième trimestre – et le ralentissement économique se reflète également sur la demande pour les autres produits construits par la multinationale québécoise.

« Je suis dans l’industrie depuis longtemps et j’ai traversé plusieurs saisons où il y a eu des défis, mais c’est la première fois que j’ai observé des conditions aussi difficiles partout en Amérique du Nord », a expliqué jeudi le président et chef de la direction de BRP, José Boisjoli, au cours d’une conférence téléphonique avec les analystes financiers, en faisant référence à l’hiver qui vient de se terminer.

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Le président et chef de la direction de BRP, José Boisjoli

M. Boisjoli, qui travaille pour le constructeur des Ski-Doo, Sea-Doo et Can-Am depuis 1989, commentait les résultats du quatrième trimestre, pendant lequel la performance financière de BRP s’est avérée inférieure aux attentes des analystes.

Après les ruptures de stock pandémiques en raison d’une flambée de la demande, les consommateurs qui se rendent chez les concessionnaires semblent maintenant avoir l’embarras du choix.

En date du 31 janvier dernier, qui marquait la fin du trimestre, les stocks étaient en hausse de 36 % chez les concessionnaires par rapport à la même période il y a un an.

Résultat : la multinationale québécoise doit ajuster sa cadence de production. Elle fléchira de 30 % du côté des motoneiges, qui sont assemblées dans son usine québécoise, laquelle compte quelque 2000 employés. La réduction des besoins de main-d’œuvre a été confirmée par la société dans un courriel.

« Nous aurons besoin d’environ 300 employés de moins que l’an dernier pour la production de Ski-Doo, a indiqué Émilie Proulx, porte-parole de BRP. La majorité d’entre eux seront des travailleurs temporaires provenant d’agences qui ne seront pas rappelés. Le reste sera constitué de mises à pied d’employés de BRP. »

À Valcourt, l’usine assemble des motoneiges sept mois par année. Par la suite, le site se tourne vers les motos à trois roues Can-Am Spyder. Le couperet tombera également en Autriche, où 200 personnes quitteront l’usine de construction de moteurs Rotax, située à Guinkirchen. Cela s’ajoute à des réductions d’effectifs ayant déjà eu lieu au Mexique l’automne dernier. À l’échelle mondiale, l’effectif du constructeur québécois est d’environ 20 000 personnes.

Plus comme avant

Stimulée par la demande pour ses motoneiges, motomarines, motos à trois roues et autoquads biplaces depuis le début de la pandémie, une période marquée par des restrictions de voyage, BRP avait habitué ses actionnaires et les analystes à une croissance constante de ses profits et revenus au cours des dernières années. Le vent est cependant en train de tourner. Malgré une détérioration de sa rentabilité, la multinationale parvient à gagner des parts de marché dans les segments des autoquads biplaces, des véhicules tout-terrain et des motomarines, selon sa présentation destinée aux investisseurs.

« Le ralentissement dans l’industrie des sports motorisés persistera probablement jusqu’en 2025, mais nous continuons de voir BRP gagner des parts de marché et lancer de nouveaux produits, ce qui placera l’entreprise en bonne posture pour une éventuelle reprise », estime l’analyste Cameron Doerksen, de la Financière Banque Nationale, dans une note envoyée par courriel.

À plus court terme, le ralentissement incite cependant la multinationale à prévenir les investisseurs que sa performance financière se contractera au cours de son prochain exercice financier même si les profits demeureront au rendez-vous. BRP s’attend à ce que son chiffre d’affaires annuel oscille entre 9,1 et 9,5 milliards, tandis que les analystes tablent, en moyenne, sur environ 10 milliards. Pour leur part, les bénéfices devraient varier entre 550 et 630 millions, en deçà des profits de 744,5 millions engrangés l’an dernier.

Un virage plus long

Avec une demande en recul chez les concessionnaires, un contexte économique qui oblige les consommateurs à se serrer la ceinture et une réduction de la cadence de production dans ses usines, BRP mettra plus de temps à conclure son virage électrique. Initialement, l’entreprise souhaitait offrir des modèles électriques dans chacune de ses catégories de produits d’ici 2026.

Ce n’est plus le cas. Des motoneiges électriques sont déjà sur le marché et les motos à deux roues électriques Can-Am seront présentées en août prochain, mais on révisera l’échéancier pour la suite des choses, a expliqué M. Boisjoli, sans donner plus de détails.

« Il s’agit d’une question d’équilibre avec les concessionnaires, a-t-il dit. Ceux-ci doivent s’assurer d’avoir l’espace suffisant dans leurs salles de démonstration. Actuellement, ils veulent réduire leurs niveaux de stocks et se concentrer sur leurs activités quotidiennes. »

La plupart des analystes anticipaient une fin d’exercice difficile pour BRP. Les investisseurs n’ont pas semblé surpris par la baisse des profits et revenus. L’action du constructeur de véhicules récréatifs a clôturé la journée à 90,95 $, en hausse de 5,4 %, ou 4,62 $.

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    Nombre de pays où sont vendus les produits de BRP.
    Source : brp