Les occasions de sabrer le champagne se font certainement plus rares ces derniers temps pour les dirigeants de la SAQ qui doivent faire face à des baisses de ventes pour le troisième trimestre consécutif.

Le mois de décembre, période où bien des consommateurs en profitent pour mettre davantage de bouteilles dans leur panier à l’occasion des Fêtes, n’aura pas permis à la société d’État de renouer avec des hausses de ventes. Celles-ci sont plutôt en baisse de 0,9 % par rapport à la même période l’an dernier.

Les résultats du troisième trimestre de l’exercice 2023-2024 clos le 30 décembre 2023 font état de ventes s’élevant à 1,414 milliard contre 1,427 milliard pour le trimestre correspondant de l’exercice précédent. Le résultat net de 522,7 millions est en baisse de 18,7 millions (3,5 %) par rapport à la même période l’an dernier.

Visiblement, la société d’État ne s’attend pas à ce que la situation s’améliore au cours des prochains mois.

« Cette légère décroissance observée lors des trois derniers trimestres pourrait se poursuivre compte tenu du contexte économique », peut-on lire dans le communiqué publié par la SAQ, jeudi.

On explique en partie cette baisse par une diminution de 9,7 % des ventes enregistrées auprès des grossistes-épiciers, passant de 137,8 millions l’an dernier à 124,4 millions cette année. Les dépanneurs et les supermarchés se sont donc approvisionnés en moins grandes quantités, ce qui ne signifie toutefois pas que les ventes auprès des consommateurs ont diminué.

Optimisation et négociations

L’annonce des résultats survient alors que la SAQ prendra d’ici le mois de mai une plus grande marge brute sur toutes ses bouteilles dont le prix est supérieur à 15 $.

L’augmentation moyenne de 1,7 % de la majoration – qui touchera environ 75 % des produits vendus sur les tablettes – entrera en vigueur en même temps que la hausse des prix fixée à la suite de négociations avec les fournisseurs. C’est à ce moment que les consommateurs connaîtront les véritables augmentations auxquelles ils feront face au moment de passer à la caisse.

« Cette majoration nous permet de rééquilibrer une partie de nos coûts », avait expliqué le président et chef de la direction de la SAQ, Jacques Farcy, lors d’un point de presse en février, ajoutant dans la foulée que la SAQ souhaitait dégager 10 millions de dollars supplémentaires.

Le contexte économique actuel a forcé la SAQ à refaire ses calculs. « En 2024, il est nécessaire pour nous d’ajuster notre majoration. » Au moment de cette annonce il y a plus d’un mois, M. Farcy avait reconnu que la baisse des ventes enregistrée depuis le début du présent exercice financier avait en partie motivé cette décision. « Effectivement, on voit que nos volumes ne sont pas en croissance. On est en légère, très légère diminution. Ça, c’est un facteur nouveau. Mais effectivement nos coûts augmentent depuis 2017, il est nécessaire de revoir la majoration cette année. »

Lors du dépôt du budget plus tôt en mars, le gouvernement Legault a également demandé aux sociétés d’État, dont la SAQ, de faire des efforts « d’optimisation » afin d’espérer renouer avec l’équilibre budgétaire.

Sans convention collective depuis un an, le Syndicat des employés de magasins et de bureaux de la Société des alcools du Québec (SEMB-SAQ-CSN) a par ailleurs signé une lettre ouverte en début de semaine dans laquelle il affirmait que mettre fin au projet d’agrandissement du Centre de distribution, estimé à 137 millions, permettrait à la SAQ de contribuer aux efforts d’optimisation.

Le syndicat estime que ce projet est un « non-sens environnemental ». « Pour un citoyen du Saguenay–Lac-Saint-Jean ou pour une résidante de la Côte-Nord, la commande d’une seule bouteille de crème de menthe passée sur SAQ.com sera traitée à Montréal puis expédiée, par camion, jusqu’à destination – sans aucun égard au fait que la même bouteille se trouve déjà dans chaque succursale de quartier, à la grandeur du territoire québécois », peut-on lire.

C’est « un non-sens sur le plan financier également : depuis plusieurs années, les employé-es de la SAQ demandent de préparer en succursale les commandes passées en ligne. La demande est présentement en discussion à la table de négociation : le temps de collecte en magasin sera beaucoup plus rapide que le délai de trois à cinq jours entraîné par l’expédition des commandes depuis Montréal », estime le syndicat.

« Le Centre automatisé de Montréal (CAM) donnera un accès à tous les produits commercialisés à la SAQ à nos clients, et ce, peu importe où ils se trouvent au Québec, a pour sa part écrit Jacques Farcy, en réponse au syndicat, dans une lettre publiée le lendemain. Le CAM est le plus grand projet d’infrastructure de la SAQ des 30 dernières années. Invoquer sa mise à la casse, ce serait être sourd à l’évolution récente du commerce de détail, mais ce serait d’abord et avant tout balayer du revers de la main ce à quoi les clients s’attendent de leur expérience avec nous. »

Par ailleurs, interrogée sur les négociations en cours, la présidente du syndicat, Lisa Courtemanche, a affirmé que les discussions allaient bien. « C’est de bon augure », a-t-elle lancé sans donner plus de détails.

Selon Mme Courtemanche, les négociations avancent beaucoup plus rapidement depuis que 89 % des syndiqués ont voté en faveur d’un mandat de 15 jours de grève à exercer « au moment jugé opportun ».

Résultats de troisième trimestre de l’exercice 2023-2024

Quelques chiffres

  • Panier moyen d’achats : 67,65 $ (baisse de 1,9 %)
  • Ventes de produits du Québec : 195,3 millions (baisse de 2,2 %)
  • Proportion des ventes par catégorie : vin (69,1 %), spiritueux (28,2 %), prêt-à-boire (2,1 %), bière et cidre (0,6 %)