L’entreprise montréalaise de services maritimes et environnementaux Logistec a rejeté une solution québécoise impliquant la Caisse de dépôt avant d’accepter l’offre d’achat d’un groupe américain.

Examinant ses options stratégiques depuis le printemps, Logistec a annoncé lundi avoir accepté une offre d’achat présentée par deux firmes privées d’investissement de New York.

La proposition de Blue Wolf Capital Partners, en partenariat avec la firme Stonepeak, s’élève à 67 $ par action, ce qui donne une valeur d’entreprise de 1,2 milliard de dollars à Logistec.

C’est l’équivalent d’une prime de 17 % par rapport au cours à la clôture des marchés vendredi, et de 53 % par rapport au prix de l’action avant l’annonce du processus d’examen stratégique, le 19 mai.

Ce jour-là, Logistec avait révélé que son actionnaire de contrôle, la famille Paquin, souhaitait vendre ses actions.

Logistec a été fondée par feu Roger Paquin il y a plus de 70 ans. Sa fille Madeleine dirige l’entreprise depuis 27 ans et est membre du conseil d’administration depuis 36 ans. Suzanne Paquin, la sœur de Madeleine Paquin, est membre du conseil d’administration depuis 36 ans et dirige une entreprise de transport maritime détenue en partie par Logistec. Leur sœur Nicole est, quant à elle, administratrice chez Logistec depuis 19 ans.

Garder le siège social au Québec

Investissement Québec est en pourparlers avec Blue Wolf en vue d’un investissement potentiel dans l’entreprise. La participation d’Investissement Québec appuierait l’engagement de Blue Wolf à maintenir le siège social et les activités de Logistec au Québec, et à poursuivre les investissements dans la province.

Blue Wolf dit avoir l’intention de réaliser un investissement de plus de 200 millions sous forme de dépenses d’investissement et d’initiatives de croissance pour « contribuer de façon importante à l’entreprise ainsi qu’à l’économie du Québec et du Canada ».

« Les services maritimes combinés aux services environnementaux de Logistec, lesquels sont axés sur la réhabilitation de conduites d’eau vieillissantes et la restauration des sols, représentent des occasions de croissance attrayantes », commente le directeur général principal de Stonepeak, James Wyper.

Plus important actionnaire institutionnel de Logistec avec une participation supérieure à 10 %, la Caisse de dépôt n’a pas souhaité révéler la teneur de l’offre déposée avec un partenaire québécois dans le cadre du processus.

La direction de la Caisse entend prendre connaissance de la circulaire détaillant l’arrangement proposé « pour bien évaluer les impacts sur l’entreprise, les employés et les autres parties prenantes au Québec ».

« Ça demeure un bon prix »

Le prix accepté par Logistec de 67 $ par action est inférieur aux attentes de Gabriel Bouchard-Phillips, gestionnaire de portefeuille chez Van Berkom. Il s’attendait plutôt à 80 $ ou plus par action.

Il concède cependant que le contexte économique est devenu plus incertain au cours des derniers mois et que Logistec manutentionne des marchandises. « La dynamique change et les taux d’intérêt ont monté », dit-il.

« Ça demeure un bon prix », ajoute-t-il, par rapport au cours boursier où l’action se vendait auparavant. Il voit difficilement comment la transaction peut être bloquée puisque la famille Paquin contrôle 77 % des actions.

Gabriel Bouchard-Phillips croit savoir ce que l’avenir réserve à Logistec. « L’entreprise sera vendue en pièces détachées d’ici trois ans. Les activités dans le secteur maritime forment un joyau et il n’y a pas de synergies avec les activités environnementales. C’est deux business séparées qui intéressent un actionnariat différent. »

Le gestionnaire de portefeuille Stephen Takacsy, de la firme Gestion Lester, croit lui aussi que Logistec vaut davantage.

« À 67 $ par action, c’est une aubaine pour Blue Wolf et Stonepeak, qui réaliseront la plus-value de maximiser la valeur de chaque division », dit-il.

« Nous et d’autres gestionnaires pensons que Logistec vaut au moins de 20 % à 30 % de plus dans sa forme actuelle, et encore plus si les deux divisions sont vendues séparément à des acheteurs stratégiques. Nous nous attendons donc à la possibilité d’une offre supérieure, ce qui est permis à ce stade-ci. »

« Dollar canadien sous pression »

Gabriel Bouchard-Phillips ne s’étonne par ailleurs pas de voir des entreprises d’ici être achetées par des intérêts américains. « Depuis 10 ou 15 ans, lorsque le dollar canadien est sous pression, les Américains en profitent pour acheter des entreprises canadiennes. »

OpSens et H2O Innovation sont deux autres entreprises québécoises ayant accepté des offres d’achat en provenance des États-Unis ce mois-ci.

Madeleine Paquin n’était pas disponible lundi pour une entrevue.

Logistec a dégagé un profit net en hausse de 18 %, à 54 millions, en 2022, sur un chiffre d’affaires en hausse de 21 % qui a frôlé les 900 millions.

Le secteur des services maritimes a manutentionné des volumes de marchandises historiques l’an dernier en raison des perturbations dans la chaîne d’approvisionnement.

Les activités dans le secteur environnemental ont été bâties de presque zéro et génèrent aujourd’hui un chiffre d’affaires supérieur à 330 millions.

Par l’entremise de sa participation dans Termont, Logistec est le plus gros opérateur de terminal de conteneurs au port de Montréal.