L’année 2023 sera à marquer d’une pierre blanche pour l’entreprise montréalaise e2ip. Sa technologie de « surfaces intelligentes » développée depuis 2016 est prête à être commercialisée, et elle pourra compter sur un financement de 120 millions qui sera annoncé ce mercredi.

Ce tour de financement de série B a été mené par Exportation et Développement Canada (EDC) et McRock Capital. Investissement Québec a doublé sa position dans l’entreprise et un nouvel investisseur, le Fonds de continuité DNA, s’est ajouté. L’exploit est d’autant plus remarquable que les fonds investis en capital de risque au Canada ont brutalement chuté début 2023, selon le média The Logic, s’établissant à 1,3 milliard US, contre 3,7 milliards US durant la même période l’année précédente.

« On n’a pas du tout été affectés, indique Eric Saint-Jacques, PDG d’e2ip. La ronde de financement a été complétée à un niveau supérieur à l’intention première, on a des investisseurs AAA. Ç’a fait de la ronde un plaisir à effectuer, on est très privilégiés d’avoir eu autant d’intérêt. »

e2ip est une entreprise peu connue du grand public employant 400 personnes. Elle a pourtant une histoire peu banale. « L’origine de la compagnie remonte à 1894 à Montréal, elle a évolué comme entreprise familiale », raconte M. Saint-Jacques.

Spécialisée en sérigraphie, notamment pour la gravure d’informations sur les plaques métalliques d’appareils ménagers, elle a connu au fur des transformations et des acquisitions un virage vers la conception de divers composants et appareils électroniques, dont des circuits imprimés. Elle a notamment des clients dans l’aéronautique, les transports et la santé et dispose de deux établissements à Montréal ainsi que d’une usine à Casablanca, au Maroc.

Commandes invisibles

Depuis 2016, en collaboration avec le Conseil national de recherches Canada (CNRC) et d’autres partenaires, e2ip prépare un grand coup : mettre au point des matériaux qui rendront caducs boutons, gradateurs et voyants pour les remplacer par des « surfaces structurelles intelligentes ». Un exemple : une cafetière conçue avec ce type de circuit imprimé flexible, totalement dissimulé dans l’appareil, qui serait entièrement contrôlée par le toucher.

« On touche à la surface comme si c’était notre téléphone intelligent, explique le PDG. On a développé de nouvelles matières qui permettent d’imprimer des circuits fonctionnels sur une feuille flexible de polycarbonate. Quand on va les déformer, les étirer, les mettre dans l’appareil, ils vont résister à cette déformation. Sur les structures extérieures de l’objet, il n’y a rien. Les voyants, les circuits de contrôle sont maintenant à l’intérieur. »

Ce que le PDG n’hésite pas à qualifier de « technologie de rupture » aurait en outre la vertu de réduire l’empreinte écologique des appareils fabriqués, assure-t-il.

« Depuis des décennies, la façon de permettre à l’être humain d’interagir avec des objets, c’est de faire des trous, ajouter des boutons, des commutateurs, des gradateurs, des lumières. On ajoute de la matière, du coût, de la complexité, des points de rupture et de défaillance. Tous ces boutons et ces méthodes traditionnelles augmentent le coût et nuisent à la durabilité. »

Cette innovation qui pourrait bouleverser notre quotidien, on commencera à la voir sur le marché dès cette année. « On travaille déjà avec les donneurs d’ordres les plus importants, pour des lits d’hôpital, des pompes à infusion, des surfaces d’avion, des détecteurs de fumée. »

Le financement de 120 millions sera notamment affecté à l’achat de chaînes de production destinées aux usines de Montréal pour la fabrication à grand volume, et aux efforts de commercialisation pour ce nouveau produit et ceux qui assurent déjà le succès d’e2ip.

En savoir plus
  • 2019
    Adoption de la raison sociale e2ip, issue du regroupement de GGI Solutions, de ClickTouch et de HeatSeal
    Source : e2ip