Le gouvernement français se prépare à rendre encore plus sévère sa taxe sur les surprofits des producteurs d’énergie, une décision qui pourrait toucher les revenus de la société québécoise Boralex.

Alors que la flambée des prix de l’énergie frappe de plein fouet les ménages européens, la France a annoncé en août qu’elle imposerait une taxe rétroactive sur les surprofits des producteurs d’énergie réalisés depuis le 1er janvier 2022.

Or, la France se prépare maintenant à serrer encore plus la vis que le plafond prévu par l’Union européenne de 180 euros le mégawatt-heure (MWh). Les élus français discutent de la possibilité de faire passer ce plafond à 100 euros le MWh pour l’énergie éolienne, solaire, hydroélectrique et nucléaire. Ce plafond serait rétroactif à partir de juillet 2022.

Si elle entre en vigueur sans modification, la décision aura un impact sur les revenus de Boralex, croit Nelson Ng, de RBC Marchés des capitaux. « Le plafond proposé éliminerait tous les gains liés aux prix élevés en France », indique-t-il.

L’analyste estimait au préalable qu’un plafond de 180 euros le MWh permettrait tout de même à Boralex de générer une augmentation liée au prix élevé de 240 millions en bénéfice avant impôt, intérêt et amortissement (BAIIA). Avec la réduction du plafond à 100 euros, ce gain ne serait plus que de 50 millions.

Les mesures françaises surviennent à un moment où il faudrait plutôt soutenir les producteurs d’énergie, plaide le président et chef de la direction de Boralex, Patrick Decostre. « C’est l’aspect rétroactif de ces dispositions qui les rend particulièrement sévères », déplore-t-il dans un courriel.

La politique française contraste avec l’approche américaine où l’on a accordé des incitatifs fiscaux, déplore le dirigeant. « La mise en place des mesures proposées en France porte préjudice à son attractivité et ternit la confiance des investisseurs qui, privés de visibilité sur la stabilité des marchés où ils investissent, pourraient être amenés à détourner leurs investissements du territoire français, au moment même où celui-ci a le plus besoin des développeurs de projets d’énergie verte. »

Avant que le taux soit abaissé à 100 euros le MWh, l’entreprise québécoise avait déjà prévenu que la mesure rétroactive de récupération des profits en France pourrait avoir un impact financier sur ses résultats. La société a inscrit une provision de 57 millions à cet égard, lors de ses résultats du troisième trimestre diffusés au début du mois de novembre.

La société avait aussi indiqué que cette provision, qui représenterait la totalité de la portion des revenus qui pourraient potentiellement être touchés par la taxe, serait mise de côté. Elle a prévenu qu’elle prévoyait dévoiler une autre provision à cet égard au quatrième trimestre.

« Ça veut dire que nous allons enregistrer les revenus (excédentaires), mais nous allons les mettre de côté immédiatement par la suite, à moins que le gouvernement publie les seuils (à partir duquel les prix demandés seraient considérés comme excédentaires) », avait expliqué le chef de la direction financière, Bruno Guilmette.

L’annonce est une « surprise désagréable », mais n’incite pas Ben Pham, de BMO Marchés des capitaux, à revoir sa thèse optimiste. « La chose importante à retenir, c’est que l’augmentation des prix était un plus, mais ce n’était pas la raison principale d’acheter l’action », commente l’analyste.

M. Pham souligne que Boralex continue d’enregistrer une croissance interne de ses activités et que son bilan est solide avec des réserves d’argent de 654 millions.

L’analyste de BMO Marchés des capitaux souligne que l’entreprise prévoit lancer 134 mégawatts en projet en France 2023. « Notre compréhension est que le plafond en France ne s’appliquera pas sur les nouveaux projets afin d’encourager la construction de nouveaux projets. »

L’action a perdu lundi 34 cents, ou un peu moins de 1 %, clôturant à 35,90 $ à la Bourse de Toronto.