(San Francisco) Elon Musk, le fantasque patron du fabricant de véhicules électriques Tesla et de la société de vols spatiaux SpaceX, mettait Twitter en orbite lundi après avoir rendu publique une importante prise de participation dans le réseau social, qu’il accuse pourtant de restreindre la liberté d’expression.

À la mi-séance à Wall Street, l’action de la plateforme s’envolait de plus de 25 %, à 49,23 dollars.

Selon un document déposé auprès de la SEC, le régulateur boursier américain, M. Musk, qui est l’homme le plus riche de la planète, a acquis près de 73,5 millions d’actions de Twitter, soit 9,2 % du capital de l’entreprise.

Cela fait de lui le plus gros actionnaire du groupe devant le fonds d’investissement Vanguard (8,8 %) et la banque Morgan Stanley (8,4 %), d’après les données de Bloomberg.

En se basant sur le prix de clôture de vendredi de l’action de Twitter, l’investissement du milliardaire d’origine sud-africaine s’élève à près de 2,9 milliards de dollars.

M. Musk s’exprime très fréquemment sur la plateforme, où il compte un peu plus de 80 millions d’abonnés, et ses annonces sur ce réseau suscitent souvent des polémiques.

À l’été 2018, il avait notamment publié un tweet où il assurait disposer des financements appropriés pour retirer Tesla de la Bourse new-yorkaise, sans en apporter la preuve.

Après une nouvelle publication malencontreuse début 2019, il avait accepté que ses messages directement liés à l’activité du fabricant de véhicules électriques soient préapprouvés par la SEC.

Le dirigeant avait également abandonné son poste de président du conseil d’administration de Tesla.

Début mars, M. Musk a toutefois demandé à un juge de New York d’annuler l’accord passé avec le gendarme boursier sur ses tweets, affirmant via son avocat que la SEC cherchait à « harceler Tesla et à réduire au silence M. Musk ».

« Liberté d’expression »

Le patron-milliardaire est par ailleurs critique des mesures mises en place par Twitter pour modérer certains contenus jugés inappropriés.

Fin mars, M. Musk a publié deux sondages sur le réseau social, l’un pour demander à ses abonnés s’ils pensaient que l’algorithme de Twitter devrait être en code source ouvert (« open source »), l’autre pour savoir s’ils jugeaient que l’entreprise respectait la liberté d’expression.  

Les votants avaient très largement répondu « oui » à la première question et « non » à la seconde.

« Étant donné que Twitter agit de facto comme une place publique, son incapacité d’adhérer aux principes de la liberté d’expression mine foncièrement la démocratie », a tweeté le patron de Tesla suite aux résultats.

« Une nouvelle plateforme est-elle nécessaire ? », avait-il questionné.

Twitter est régulièrement accusé de censure par de nombreuses voix conservatrices aux États-Unis, notamment depuis la suspension du compte de Donald Trump l’an passé. Les démocrates et de nombreuses ONG lui reprochent au contraire de laisser passer trop de messages relevant de la haine ou du racisme.

À l’instar de Facebook et de YouTube, le réseau à l’oiseau bleu estime que l’ancien président a encouragé ses partisans à la violence avant l’assaut du Capitole, le 6 janvier 2021.

En réponse à son éviction, M. Trump a lancé en février sa propre plateforme, Truth Social.

Lundi, la députée Marjorie Taylor Greene, très proche de l’ex-locataire de la Maison-Blanche, s’est demandée si l’investissement de M. Musk marquerait le « retour de la liberté d’expression » sur Twitter.

« Cela demandera du courage car le régime investit lourdement dans une certaine industrie et des menaces viendront sans nul doute », a tweeté l’élue.  

Participation passive ?

Elon Musk a racheté des actions ordinaires, qui ne lui donnent pas de pouvoirs spéciaux.

Dans le document transmis à la SEC, il précise d’ailleurs que sa prise de participation, inférieure à 10 % des actions ordinaires, est passive, c’est-à-dire qu’il ne compte pas influer sur les grandes décisions stratégiques de l’entreprise.

Mais cette entrée au capital pourrait être le prélude à un rôle plus actif au sein de l’entreprise, estiment certains experts.

« Nous nous attendons à ce que cette participation passive marque le début de discussions plus approfondies avec la direction et le conseil d’administration de Twitter, qui pourraient conduire à une participation active et un actionnariat potentiellement plus agressif », ont indiqué dans une note Dan Ives et John Katsingris de Wedbush Securities.

Contacté par l’AFP, Twitter n’a pas réagi dans l’immédiat.