Rattrapée par des allégations d’irrégularités qui continuent de planer au-dessus de son ancienne division ferroviaire, Bombardier atterrit sur la liste de surveillance du fonds souverain de la Norvège – le plus important du genre dans le monde – qui égratigne l’entreprise québécoise.

La banque centrale norvégienne, qui gère le fonds, ne mâche pas ses mots à l’endroit de la multinationale, désormais exclusivement recentrée dans la construction de jets d’affaires. À son avis, il existe un « risque inacceptable que la compagnie contribue à une corruption flagrante ou en soit elle-même responsable ».

Selon la firme de données financières Refinitiv, le fonds souverain de la Norvège détient une participation de 1,2 % dans Bombardier. L’institution n’a pas l’intention de liquider ses actions pour le moment.

« Les enquêtes du conseil ont révélé que Bombardier ou ses filiales peuvent être liées à des allégations ou soupçons de corruption dans six pays sur une période de plus de 10 ans », explique le fonds, dans un document de 21 pages.

En plus de l’entreprise québécoise, les noms de Hyundai Glovis, filiale du géant de l’automobile sud-coréen, et Adani Ports (Inde) ont été ajoutés à la liste de surveillance du fonds, dont l’actif est de 1300 milliards de dollars.

Dans son rapport, l’institution se penche notamment sur d’importants contrats de matériel ferroviaire de Bombardier Transport en Azerbaïdjan, en Russie, en Afrique du Sud ainsi qu’en l’Indonésie.

Les activités de matériel roulant de Bombardier appartiennent à Alstom depuis janvier 2021. Malgré tout, l’entreprise québécoise a offert une garantie bancaire d’environ 350 millions CAD à Alstom si son ancienne division écope de sanctions financières.

En décembre dernier, un ex-cadre de Bombardier Transport en Suède avait été acquitté par la justice suédoise après avoir fait l’objet d’accusations de corruption en lien avec le contrat qui avait été décroché par un consortium dirigé par l’entreprise québécoise en Azerbaïdjan.

« Le conseil note qu’en 2015 et 2016, la compagnie avait reçu trois rapports internes concernant le projet de l’Azerbaïdjan, souligne le rapport du fonds norvégien. D’après le conseil, Bombardier n’a pas enquêté sur ces questions avant le début des démarches de la police suédoise à l’automne 2016. »

L’investisseur institutionnel reconnaît toutefois que la plupart des irrégularités soulevées dans son rapport concernent l’ancienne division de matériel roulant de Bombardier, plus impliqué dans les contrats publics, où les risques de corruption sont plus élevés. Pour cette raison, il demeurera actionnaire de la compagnie. Bombardier demeurera sur la liste de surveillance pour deux ans.

« D’après les informations actuellement connues de la société, Bombardier n’a trouvé aucune preuve de comportement répréhensible », a répondu la compagnie, dans une déclaration envoyée par courriel, mardi après-midi.

La décision du fonds souverain de la Norvège n’a pas effrayé les investisseurs. À la Bourse de Toronto, mardi, l’action de catégorie B de Bombardier a bondi de 14,6 %, ou 17 cents, pour clôturer à 1,33 $. À l’instar de bon nombre de multinationales, l’avionneur a rompu ses liens avec la Russie parce que le pays a décidé d’attaquer l’Ukraine.