La PME de Coteau-du-Lac, près de Vaudreuil-Dorion, ouvrira prochainement chez nos voisins du Sud sa filiale Technostrobe Offshore Solutions, dont l’usine fera l’assemblage d’équipements de balise pour les éoliennes en mer.

Il s’agit d’un investissement de 4,5 millions US à Albany, capitale de l’État de New York, à 360 km au sud de Montréal.

« C’est le plus récent développement d’un virage stratégique entrepris en 2018 avec l’achat de l’équipementier néerlandais de systèmes de balise maritime ITO Navaids », dit Francis Lacombe, président, lors d’un entretien.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Le président de Technostrobe, Francis Lacombe

« À l’époque, on voyait que les projets éoliens en mer étaient pour aboutir dans les années à venir et les développeurs de parcs étaient pour être sensibles à une proposition d’une entreprise capable d’amalgamer les produits de balisage de l’aviation, que Technostrobe faisait à Montréal, et les produits de balisage de la navigation, qui étaient produits aux Pays-Bas », explique-t-il.

À la différence des éoliennes terrestres, les moulins à vent en mer sont des obstacles à la fois pour les avions et pour les bateaux. Ils nécessitent toute une série d’équipements de balisage, lumineux et sonore, comme des détecteurs de visibilité, des crieurs de brouillard et des lumières d’aide à la sécurité.

« La mission de notre filiale américaine est de préparer tous ces équipements dans une trousse qui va simplifier l’installation des équipements pour le client tout en augmentant le niveau de qualité », résume M. Lacombe, qui travaille chez Technostrobe depuis 2008.

Selon ses dires, Technostrobe se démarque de ses pairs par ses connaissances à la fois du marché américain et des constructeurs européens d’éoliennes, surtout depuis son acquisition aux Pays-Bas. L’Europe a en effet une longueur d’avance sur l’Amérique du Nord pour ce qui des parcs éoliens en mer.

Un historique d’innovations

Fondée en 2001 par Guy Buisson, Technostrobe a d’abord fait sa niche en réussissant à séparer le module optique, les lumières au sommet de la tour, du module de puissance électronique, au bas de la tour. Réussir à combattre la loi d’Ohm – plus il y a de la distance entre la puissance et le module optique, moins il y aura d’énergie pour les lumières – a permis à l’entreprise de faciliter la vie aux exploitants des tours de communication en leur permettant d’effectuer l’entretien des équipements au sol plutôt qu’à 80 m et plus dans les airs.

Par la suite, le fabricant a mis au point la technologie LIDS (Lighting Intensity Dimming Solution), laquelle règle l’intensité des balises lumineuses selon la visibilité. L’innovation contribue à l’acceptabilité sociale des parcs éoliens en diminuant la pollution lumineuse.

Technostrobe écrira la prochaine page de son histoire aux États-Unis. L’usine d’Albany occupera 1500 m⁠2 et emploiera 20 personnes. L’ouverture est prévue le 1er février prochain. Les premières livraisons doivent commencer le 1er juin 2022.

Seul actionnaire de la PME qu’il a acquise de son fondateur en 2021, Francis Lacombe conclut actuellement le montage financier relatif à l’expansion américaine. Les partenaires financiers usuels de la société sont le Mouvement Desjardins et Fondaction CSN.

Plaque tournante de l’éolien en mer

L’ouverture d’une usine d’assemblage aux États-Unis était demandée par les principaux donneurs d’ouvrage, que ce soient les exploitants de parcs éoliens en mer ou encore les constructeurs d’éoliennes eux-mêmes, en vertu des exigences du Buy America Act. « Ça fait partie des règles du jeu. Cependant, le siège social québécois va y gagner en réussissant à vendre plus de produits à la filiale américaine », précise M. Lacombe.

Pourquoi Albany plutôt que Plattsburgh, comme Bombardier, naguère, et Nova Bus ? « Il est en train de se bâtir un hub de fabrication des composants d’éoliennes en mer à Albany grâce à ses installations portuaires sur le fleuve Hudson qui donne accès à la côte est américaine », répond le président.

Pièce maîtresse de cette plateforme de production, le fabricant Marmen de Trois-Rivières construit, avec son partenaire Welcon du Danemark, une usine d’assemblage de composants d’éolienne en mer au port d’Albany. La production doit commencer à la fin de 2023. Marmen est le fabricant retenu par le consortium Equinor Wind US, gagnant de deux appels d’offres de l’État de New York totalisant près de 2500 mégawatts (MW), soit assez pour desservir 1,3 million de maisons.

L’État de New York a cinq parcs éoliens en mer en voie de développement, représentant environ 50 % de son objectif d’atteindre une puissance de 9000 MW d’énergie éolienne d’ici 2035. À titre comparatif, le Québec se classe au deuxième rang des principaux marchés canadiens de l’éolien avec une puissance installée d’un peu moins de 4000 MW.

Le marché potentiel est conséquent. « Nous avons décroché des contrats pour les cinq premiers parcs en mer et on prévoit la construction de 89 parcs en mer sur la côte est américaine au cours des 25 prochaines années. » M. Lacombe vise des revenus de 45 millions d’ici 2025.

Technostrobe en bref

Fondée en 2001
Présidée par Francis Lacombe
Trois installations (Coteau-du-Lac, Pays-Bas et bientôt Albany)
Un peu plus de 15 millions de dollars de revenus en 2021 (60 % à l’export)
70 employés (en comptant les embauches à venir à Albany)

Forces

  • Créneau de marché clairement défini
  • Avantage comparatif en raison de sa gamme de produits novateurs
  • Jumelage des connaissances des normes nord-américaines associées à l’électricité et des besoins des fabricants européens d’éoliennes en mer

Faiblesses

  • Processus d’innovation à institutionnaliser
  • Croissance rapide à financer