La société de transport maritime fait le bilan d’une expérience avec du carburant 100 % végétal

La moitié de la flotte canadienne du Groupe CSL a été alimentée pendant la dernière saison de navigation avec du carburant 100 % végétal, ce qui constitue une première au Canada, et probablement au monde, selon le président de l’entreprise.

« On est très satisfaits des résultats », résume Louis Martel, président et chef de la direction, lors d’un entretien avec La Presse.

La société de transport maritime établie à Montréal vient de faire le bilan d’une expérience qui a commencé en 2020, avec deux navires, et qui a été étendue en 2021 à la moitié de sa flotte canadienne, soit huit bateaux.

C’est la plus longue expérience du genre dans le monde, selon l’entreprise aussi connue sous le nom de Canada Steamship Lines. « La bonne nouvelle, c’est que ça marche », dit Louis Martel. Du biocarburant composé à 100 % de résidus végétaux a propulsé sans problème les navires pendant les mois de la saison de navigation, et surtout sans exiger de modification aux moteurs des bateaux qui fonctionnent normalement au diesel.

La moins bonne nouvelle, c’est que le biocarburant est encore rare et coûteux. Il coûte 1,5 fois plus cher que le gasoil marin utilisé par l’industrie maritime.

Quand on en utilise 15 à 20 tonnes par jour, ça fait une différence.

Louis Martel, président et chef de la direction du Groupe CSL

Même si l’expérience est concluante et qu’elle se poursuivra l’an prochain, les biocarburants sont une énergie de transition pour le secteur maritime, croit le président de CSL. « On sait que le diesel est appelé à disparaître, mais on ne sait pas encore quel sera le carburant du futur pour les bateaux », précise-t-il.

Est-ce que sera l’hydrogène ? L’électricité ? « Le jury est encore en délibération là-dessus », illustre Louis Martel, qui estime qu’il faudra encore des années avant d’avoir la réponse.

Un long trajet

La transition énergétique du secteur maritime s’annonce longue, notamment à cause de cette incertitude technologique. Acheter un bateau, aujourd’hui, c’est investir pour les 15 à 20 prochaines années. « C’est notre plus gros dilemme, parce qu’on veut continuer à renouveler notre flotte et faire grandir la compagnie. »

Malgré son coût élevé, le biocarburant peut aider à faire un bout de chemin et contribuer à la transition énergétique du secteur maritime, croit le Groupe CSL. Après 30 000 heures de fonctionnement en 2021, sa flotte de navires a réduit ses émissions de GES de 23 % grâce à l’utilisation de biocarburant.

Si CSL a pu remplacer avec succès du combustible fossile par du biocarburant, c’est surtout parce que le transporteur fait essentiellement de la navigation côtière. Il ne traverse pas les océans, ce qui limite et facilite le ravitaillement de ses navires.

« On est réalistes, dit son président. Les infrastructures [de ravitaillement] et les approvisionnements ne sont pas là. » Il faudra des incitatifs de la part des gouvernements pour développer ces infrastructures, selon lui, et la collaboration d’administrations portuaires pour adapter leurs installations.

CSL n’a pas reçu d’aide publique pour mener son expérience avec les biocarburants, mais le transporteur a pu compter sur le soutien de ses fournisseurs, Canada Clean Fuels et Sterling Fuels.

En plus de poursuivre l’expérience au Canada cette année, CSL voudrait faire la même chose en Australie, où elle exploite une flotte de 14 navires. Le transporteur est aussi présent en Europe, en plus du Canada et des États-Unis.