Secoué par la prise de parole des derniers jours sur les réseaux sociaux et les nombreux témoignages alléguant des inconduites sexuelles, du harcèlement psychologique et de l’abus de pouvoir dans l’industrie du jeu vidéo depuis de nombreuses années, le grand patron d’Ubisoft promet de prendre la situation en main.

Dans une lettre envoyée aux employés lundi, Yves Guillemot affirme vouloir changer les façons de procéder pour régler ces problèmes. « Je tiens à exprimer ma profonde solidarité à toutes les personnes qui ont été directement blessées et vous assure que je suivrai personnellement chacune des situations signalées, dit-il. Ces agissements sont en contradiction totale avec nos valeurs et avec ce que je souhaite pour Ubisoft. »

Sans nommer le type d’allégations en cause, son PDG et cofondateur souhaite revoir en profondeur les « systèmes pour que ce type de situations ne puisse plus se reproduire ». Il dit vouloir offrir un environnement respectueux qui contribue à l’épanouissement de tous et créer un groupe de travail multidisciplinaire pour mettre en place des outils et des solutions. Il a ainsi espoir de « détecter, remonter et résoudre tout incident ou problème grave sans délai et de manière impartiale, explique-t-il. Pour parvenir à ces propositions, avec le soutien d’un partenaire externe, ce groupe de travail devra notamment vous écouter et organiser des sessions de focus groups pour récupérer vos feedbacks. Je participerai régulièrement à ces moments d’échange ».

PHOTO CHRISTOPHE ARCHAMBAULT, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Yves Guillemot, PDG d’Ubisoft

Trois jours auparavant, un syndicat d’employés d’Ubisoft à Paris, Solidaires Informatique, a fait savoir, dans une lettre aussi, qu’elle souhaitait une identification de « toutes les personnes, les mécanismes et la culture qui a permis et protégé ces violences et en la changeant radicalement, plutôt que quelques licenciements, de la communication externe et du damage control. C’est un minimum, qui ne saura réparer les innombrables talents féminins que l’entreprise aura étouffé[s] sous ces violences, mais qui, nous l’espérons, aidera à briser, au moins à Ubisoft, ce cercle vicieux qui a cours dans toute l’industrie ».

Solidaires Informatique, membre de l’union interprofessionnelle Solidaires, en France, salue aussi le courage de toutes celles qui ont parlé au fil des ans. « Nous leur adressons tout notre soutien, et nous réaffirmons notre détermination à lutter contre toutes les formes de violences masculines faites aux femmes. »

Flot de témoignages

La semaine dernière, le flot de témoignages, ciblant particulièrement Ubisoft, a conduit à des enquêtes internes dans l’organisation, puis aux suspensions des vice-présidents Maxime Béland (Toronto) et Tommy François (Paris), en plus de « nombreux autres employés », selon l’agence Bloomberg. La tourmente a aussi emporté le directeur créatif du prochain opus de la célèbre franchise Assassin’s Creed, devant paraître cet automne. Ashraf Ismail, qui travaillait à Montréal, a quitté son poste.

Joint par La Presse pour savoir s’il y avait eu d’autres suspensions depuis, le studio montréalais d’Ubisoft a répondu par courriel que plusieurs enquêtes étaient en cours. « Les employés concernés sont suspendus, écrit Cédric Orvoine, directeur des communications externes et des relations publiques d’Ubisoft. Nous ne commenterons pas spécifiquement les cas ou l’état d’avancement des enquêtes. »

— Avec Jean-François Codère, La Presse

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