(New York) L’avionneur Boeing, confronté à la crise sanitaire et aux déboires du 737 MAX, devrait supprimer 10 % d’emplois dans sa division aviation civile, ont indiqué à l’AFP mercredi deux sources proches du dossier.

Cette cure d’austérité devrait affecter les programmes long-courriers 787 et 777 et le monocouloir 737 MAX, ont ajouté ces sources sous couvert d’anonymat.

Elle pourrait concerner jusqu’à 7000 postes : Boeing emploie plus de 160 000 personnes à travers le monde, dont 70 000 dans l’État de Washington (nord-ouest), où sont assemblés la plupart de ses avions civils.

Seule une partie du 787 est produite en Caroline du Sud.

Conscient du tollé politique que ces licenciements pourraient susciter, car ils interviennent au moment où Boeing demande 60 milliards de dollars d’argent public pour lui et ses fournisseurs, David Calhoun, le directeur général, souhaite les officialiser avant de débuter des négociations délicates avec le gouvernement fédéral, d’après les sources.

Contacté par l’AFP, le constructeur aéronautique, qui doit débuter les discussions dans quelques jours avec le Trésor, n’a pas souhaité commenter directement les informations.

Le gouvernement fédéral conditionne son aide à l’engagement des entreprises à ne pas procéder à des licenciements une fois qu’elles ont reçu l’argent du contribuable.

« Départs volontaires »

« Nous proposons un programme de départs volontaires pour permettre aux employés américains […] qui veulent quitter l’entreprise de le faire avec une rémunération des prestations sociales », a déclaré le groupe dans un courriel.

« Ce programme vise à réduire la taille de nos effectifs via des mesures volontaires et, plus important, de minimiser de futures mesures concernant les effectifs », a-t-il ajouté.

Le vaste plan historique de 2200 milliards de dollars pour stabiliser l’économie américaine, durement affectée par les mesures draconiennes pour endiguer la pandémie du coronavirus, prévoit une enveloppe de 17 milliards de dollars pour des entreprises essentielles à la sécurité nationale.

Boeing, qui est également un des principaux fournisseurs du Pentagone à qui il livre des navires-citernes et des avions de combat, est considéré par de nombreux experts comme le futur récipiendaire de ce coup de pouce sur mesure.

L’avionneur peut également solliciter le programme de prêts de 600 milliards de dollars, sous la forme de prêts garantis, destiné aux grandes entreprises dans le cadre du plan d’assistance américain.

Les mesures de confinement, les interdictions d’entrée sur le territoire et le recours massif au télétravail pour endiguer la propagation de la COVID-19, ont fait brutalement chuter le transport aérien dans le monde entier.

Cette crise a conduit les compagnies aériennes à annuler des commandes de nouveaux avions et/ou reporter de plusieurs années les livraisons d’aéronefs prévus cette année.

Le loueur d’avions Avalon a annulé récemment une commande pour 75 Boeing 737 MAX, idem pour le groupe chinois China Development Bank qui ne veut plus de 29 Boeing 737 MAX.

Boeing ne sait pas ce que vont devenir des commandes passées par Norwegian Air pour 92 appareils de la famille 737 MAX et 5 long-courriers 787, après que la compagnie a mis en faillite quatre filiales européennes.

« Il n’y a aucun doute que l’aviation civile aura un autre visage quand nous allons nous rétablir de la pandémie. Il est encore très tôt de dire quel sera ce visage, notamment en termes de flotte des clients […] et de demande », souligne Boeing dans le courriel adressé à l’AFP.

La crise sanitaire a déjà causé des dégâts chez Boeing : le géant de Seattle a dû fermer temporairement ses usines aux États-Unis et vient de les rouvrir cette semaine, mais la production reprendra de façon graduelle.

La valeur de l’entreprise a fondu : Boeing a perdu près de 108 milliards de dollars de capitalisation boursière depuis janvier ; son action a chuté de 57 %.

Boeing est par ailleurs toujours englué dans les difficultés du 737 MAX, cloué au sol depuis plus d’un an après deux accidents rapprochés ayant fait 346 morts.

Les incertitudes entourent le calendrier de sa remise en service. Des sources proches du dossier avaient indiqué à l’AFP mi-avril que le vol test du 737 MAX modifié, nécessaire au feu vert des régulateurs, qui devait avoir lieu en avril avait été repoussé en mai.

Boeing devrait également changer le patron du programme 737 MAX.

Des annonces pourraient intervenir sur tous ces points dans la soirée, ont dit ces sources, mais il n’est pas exclu que Boeing le fasse aussi le 29 avril prochain lors de la publication de ses résultats du premier trimestre.