Le grand patron de la Banque Nationale s’attend à ce que la lutte contre l’inflation continue pour au moins deux autres années.

« L’inflation risque d’être un défi encore en 2024 et en 2025 », a dit Laurent Ferreira mardi au cours d’un évènement réunissant plus de 800 personnes du milieu des affaires au Palais des congrès de Montréal.

Les tensions géopolitiques de plus en plus complexes, la transition énergétique et le désir de se réindustrialiser sont tous, souligne-t-il, des éléments inflationnistes.

« Ça va coûter cher », a-t-il précisé en conversation de fauteuil avec Annick Guérard, présidente de Transat. Cette discussion avec Annick Guérard était organisée en marge d’une allocution prononcée par Laurent Ferreira à l’invitation du Cercle canadien de Montréal.

« Il faut rester prudent et avoir des coussins », soutient Laurent Ferreira.

Je prévois que les taux d’intérêt cinq ans et dix ans seront plus élevés d’ici deux ans.

Laurent Ferreira, grand patron de la Banque Nationale

Il note que la politique monétaire commence à se faire sentir et qualifie d’« excellente nouvelle » la récente décision de la Banque du Canada de marquer une pause et de ne pas hausser les taux d’intérêt davantage pour le moment.

« On ne comprend pas encore l’impact complet de la hausse des taux d’intérêt. À court terme, on doit surveiller le marché de l’emploi, les renouvellements hypothécaires et les refinancements en immobilier commercial à de nouveaux taux. Il faut prendre le temps d’observer tout ça. Les coûts vont augmenter. »

Crise bancaire

Laurent Ferreira se montre par ailleurs stupéfait par les développements dans le secteur financier à l’extérieur du pays. Il a commencé par parler de Credit Suisse, cette banque européenne dont le rachat par UBS a récemment été annoncé.

Je ne pensais pas voir dans ma carrière une aussi grande banque tomber. C’est quand même une surprise.

Laurent Ferreira, grand patron de la Banque Nationale

« Credit Suisse est un cas isolé différent de ce qui se passe aux États-Unis, a-t-il dit. Dix ans d’erreurs stratégiques et de ratés dans la gestion des risques et d’idées de grandeur. Ça s’est finalisé dans une perte totale de confiance de la part des actionnaires. »

À propos des difficultés éprouvées par certaines banques américaines de relative plus petite taille, le PDG de la Banque Nationale a fait référence à quelques facteurs principaux pour expliquer la situation ébranlant l’industrie.

« Il y a eu des erreurs réglementaires, une défaillance au niveau de la supervision de certaines banques. Et aussi au niveau de la gestion des risques. Ce n’était clairement pas des priorités dans la gestion de ces banques-là. »

Lorsque l’inflation a commencé à se faire sentir au début de l’an passé, il était devenu évident à son avis que les banques centrales allaient augmenter les taux de façon énergique.

Il fallait dès lors se placer en position défensive, commencer à effectuer des calculs, vérifier les bilans, réaliser des tests de résistance et poser des questions, dit-il.

« C’est ce que nous avons fait à la Banque Nationale. Mais clairement, ce n’était pas le cas dans ces banques-là », affirme Laurent Ferreira en pointant les banques américaines en détresse.

Il a aussi parlé de la nécessité d’avoir un modèle d’affaires diversifié. « Si tu finances uniquement un secteur, un accident va se produire. Le modèle diversifié où tu finances plusieurs industries et que ton financement provient de sources multiples est la bonne approche. »

Laurent Ferreira a terminé en disant qu’une expertise en gestion de risques de taux d’intérêt et en navigation de marchés volatils ne devait pas être une option dans une banque.