(Washington) La chambre basse du Congrès des États-Unis a adopté mercredi un cadre légal censé permettre de réguler le marché des cryptomonnaies, suscitant l’enthousiasme des défenseurs de ces actifs, mais des craintes d’accroissement des risques potentiels pour les marchés financiers.

La loi pour « l’innovation financière et la technologie du 21siècle » (ou FIT21), portée par des élus républicains à la Chambre des représentants, vise à partager la responsabilité du secteur entre les deux principales agences américaines chargées de la régulation des marchés financiers, la SEC et la CFTC.

LA CFTC se concentrerait sur les actifs décentralisés, ce qui est le cas de l’immense majorité des cryptomonnaies, à l’image du bitcoin, alors que la SEC, dont la mission est de protéger les petits porteurs, verrait son pouvoir affaibli avec à sa charge les cryptomonnaies qui restent largement contrôlées par leurs créateurs.

« Situation impossible »

« La SEC et la CFTC se livrent actuellement une bataille de polochons pour le contrôle de cette catégorie d’actifs », a ironisé Patrick McHenry, président de la commission des services financiers de la Chambre des représentants.

« Elles ont créé une situation impossible dans laquelle les mêmes entreprises font l’objet de mesures concurrentes et contradictoires de la part de deux agences différentes », a-t-il déploré dans un communiqué.  

Pour les défenseurs des cryptoactifs, aucune des deux agences n’est réellement apte à contrôler ces marchés, du fait d’une approche qu’ils estiment dépassée et de règles inadaptées.

Pour les élus républicains, FIT21 renforcera la supervision, alors que l’usage des cryptomonnaies s’est développé rapidement, avec plus de transparence et de responsabilisation des plateformes d’échanges et des agents impliqués.

Mais le patron de la SEC Gary Gensler s’oppose à ce texte, qui pourrait avoir des difficultés à passer l’étape du Sénat, à majorité démocrate.

Dans un communiqué, M. Gensler a estimé que la loi « créera de nouvelles lacunes réglementaires et fragilisera plusieurs décennies de savoir-faire dans la régulation des contrats d’investissement, faisant courir un grand risque aux investisseurs et marchés financiers ».

Selon lui, les contrats d’investissements enregistrés dans la blockchain ne seraient plus considérés comme des titres, ce qui les ferait, de fait, sortir de la supervision de la SEC et réduirait la protection des investisseurs.

« Faillites, fraudes et banqueroutes »

« Les faillites, fraudes et banqueroutes enregistrées dans ce secteur ne sont pas dues à l’absence de règles ou du fait de règles obscures », a-t-il ajouté. « Elles se produisent parce que nombreux sont ceux qui n’y respectent pas les règles ».  

« Nous devrions faire le choix de protéger les investissements plutôt que faciliter les modèles économiques qui ne sont pas conformes » aux règles, a-t-il avancé.

Avec cette loi, les entreprises du secteur pourraient alors certifier elles-mêmes des investissements et produits dans une catégorie particulière de « marchandises numériques », ce qui leur permettrait d’éviter la supervision de la SEC, a insisté M. Gensler.

Des inquiétudes balayées par l’élu French Hill, qui dirige la sous-commission chargée des actifs numériques : « Contrairement à ce que prétendent certains détracteurs, cette proposition de loi ne crée pas un système “un peu léger” pour les escrocs de la cryptomonnaie et n’empêche pas la SEC de contrôler ses marchés ».

Si elle s’est dite prête à travailler avec le Congrès pour « garantir un cadre réglementaire complet et équilibré pour les actifs numériques », l’administration du président Joe Biden s’oppose à la proposition de loi, estimant qu’elle n’offre pas de « protections suffisantes pour les consommateurs et les investisseurs ».  

Une soixantaine d’entreprises ont de leur côté soutenu la proposition de loi, qui a aussi reçu les faveurs du rival républicain de Joe Biden à la présidentielle, Donald Trump, qui a d’ailleurs commencé à accepter les donations en cryptomonnaies.