Le ménage a débuté chez Groupe Sélection, qui verra son réseau de 48 résidences pour aînés (RPA) réduire de taille significativement dans les prochains mois, apprend-on dans le plus récent rapport de gestion préparé par le contrôleur responsable du redressement financier de l’entreprise.

Sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC) depuis novembre dernier, le géant des RPA et de la construction est actuellement dirigé par le contrôleur Christian Bourque, de PwC. Son plus récent rapport a été déposé mardi, à la veille d’une audience devant la Cour supérieure du Québec pour faire le point sur la restructuration.

Partenaire de longue date de Sélection, Revera, qui appartient indirectement à l’office d’investissement de la caisse de retraite des fonctionnaires fédéraux PSP, entend racheter les participations de Sélection dans 25 RPA. Idem pour Blackstone, qui est en partenariat avec Sélection pour 11 autres complexes.

En dépit de cette situation, M. Bourque se fait rassurant à propos des résidants hébergés dans les RPA gérées par Sélection.

« Les activités sont stables, sécuritaires et gérées adéquatement », écrit le contrôleur, qui a visité cinq RPA le 13 décembre dernier, en compagnie d’un représentant du cabinet Woods, nommé à titre d’avocats représentant les résidants, dans le cadre du processus de redressement financier.

En ce qui a trait aux propriétés concernées par des changements, Sélection détient soit 5 % de l’avoir, soit 25 %. Une seule résidence, à Repentigny, est détenue à 50 % par Sélection. Le rapport ne précise pas ce qu’il adviendra de la gestion des résidences si le rachat des participations de Sélection par ses partenaires se concrétise.

D’autres transactions bientôt conclues

Le Fonds de solidarité FTQ va racheter deux immeubles à Lachenaie dans lesquels la participation de Sélection s’élève à 50 %. La valeur des immeubles est estimée à 98 millions. Sélection a aussi vendu ses participations de 50 % dans District Union Liva, actuellement en construction et terminé à 32 %.

Une autre transaction est en négociation. Elle concerne trois immeubles situés à Trois-Rivières, Sherbrooke et Québec. Celui de Québec est pratiquement terminé. Sélection détient 50 % des trois immeubles.

Par ailleurs, l’immense complexe Espace Montmorency, près de la station de métro du même nom à Laval, fait face à des enjeux, réalise-t-on à la lecture du rapport du contrôleur.

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

L’Espace Montmorency, à Laval, en février dernier

Il s’agit d’un complexe multiusage d’une valeur de 450 millions comprenant un hôtel, des bureaux, des commerces, des tours résidentielles et un stationnement souterrain. Ses partenaires sont le Fonds FTQ, Montoni, Montez et Sélection, à un quart chacun. Dans la partie hôtelière, Montoni détient 30 %, la FTQ, 25 %, Sélection, 30 % et Urgo, le futur exploitant hôtelier, 15 %. L’entrepreneur général est un consortium formé de Montoni et Sélection.

Dans le rapport de PwC, on apprend que les 700 appartements locatifs du complexe ne sont occupés qu’à 50 % alors que la construction est complétée à 97 %.

Pour ce qui est des bureaux, finis à 90 %, c’est 55 % de l’espace qui est loué. Le cégep Montmorency en sera le locataire principal. Les autres locataires annoncés sont DHC Avocats, Banque Scotia, les comptables Deloitte et Montoni. En revanche, Groupe Sélection, qui devait y élire domicile, n’y déménagera pas finalement.

La construction de l’hôtel de 188 chambres est arrêtée depuis l’été. La fin des travaux est pour l’instant prévue en mai 2023. On ne connaît pas la cause de l’arrêt.

La discorde semble régner entre les partenaires puisque le contrôleur prend la peine d’indiquer que les parties « réservent leurs droits quant à des réclamations pour dommages ». En temps et lieu, celles-ci seront tranchées par un arbitre, précise M. Bourque.

Des discussions sont en cours afin que le Fonds FTQ, qui a préalablement avancé 21 millions plus les intérêts à Sélection pour financer son apport en capital dans Espace Montmorency, rachète les participations de Sélection dans le projet lavallois.

Le couperet est par ailleurs tombé chez Sélection depuis que M. Bourque est aux commandes. Il y a eu des mises à pied, mais elles n’ont pas été chiffrées dans le rapport. Sélection a précisé qu’il s’agissait d’une quarantaine de personnes du côté des activités de construction. Cela a permis de réduire les dépenses de l’ordre de 338 000 $.

De plus, on ne fait plus affaire avec des pigistes et des consultants puisque le régime minceur n’est pas terminé. En tenant compte des suspensions d’appels de fonds et de l’arrêt de certains chantiers, les dépenses devraient avoir fléchi d’environ 14 millions à la fin de février.

Des rivaux de Sélection veulent profiter des déboires

Des concurrents de Groupe Sélection essaient de profiter des déboires de l’entreprise pour convaincre les résidants de résidences pour aînés (RPA) de plier bagage. La Presse a pris connaissance d’une missive de Résidence Lux Gouverneur qui s’est notamment retrouvée dans les boîtes aux lettres des résidences du complexe Sélection Retraite Rosemont. « Comme vous le savez, le Groupe Sélection est en difficulté financière, ce qui entraînera malheureusement encore plus de rotation d’employés chez Sélection Retraite, écrit Kathy Savard, présidente de Lux Gouverneur. La stabilité est nécessaire pour assurer la quiétude et le bien-être des retraités. » La lettre vante les mérites du complexe situé rue Sherbrooke Est et incite les résidants de Sélection à prendre rendez-vous pour une visite. Un lecteur qui a transmis le message à La Presse s’est étonné de cette pratique de Lux en soulignant qu’il n’y avait pas d’« effets négatifs de la crise qui affecte Sélection » ressentis chez Sélection Retraite Rosemont. Mardi, Mme Savard n’avait pas rappelé La Presse. Il s’agit d’une « publicité trompeuse », réplique Sélection, dans une lettre transmise à ses résidents pour corriger le tir. Les propos de Lux Gouverneur contiennent « plusieurs informations erronées », se désole l’entreprise.

En savoir plus
  • 7 millions
    Somme perdue mensuellement par Sélection avant qu’elle se mette à l’abri de ses créanciers
    Source : pwc