Même si Énergir recevra une compensation financière d’Hydro-Québec pour diminuer la consommation de gaz naturel, l’entreprise continue de brancher de 3000 à 4000 nouveaux clients par année.

Ces nouveaux clients feront éventuellement augmenter le versement que devra faire Hydro-Québec, a reconnu mercredi son président et chef de la direction, Éric Lachance. « Mais au final, la valeur de l’entente est là pour Hydro-Québec », a-t-il soutenu après s’être adressé aux membres de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.

L’entente entre les deux entreprises prévoit qu’Hydro-Québec versera 400 millions à Énergir jusqu’en 2030 pour ses clients qui adopteront la biénergie, une compensation qui atteindra au moins 1,4 milliard en 2044 pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre et qui pourrait être beaucoup plus élevée, selon certains critiques (voir encadré à la fin du texte).

Avec le branchement de nouveaux clients et la croissance économique, le volume de gaz vendu par Énergir et les émissions de gaz à effet de serre augmenteront. « Cette année, avec la reprise économique, les volumes vont augmenter, reconnaît Éric Lachance, mais l’objectif est de les faire diminuer. » Il s’est dit incapable de prévoir avec précision quand les volumes de vente de gaz naturel commenceront à diminuer au Québec.

Un virage majeur

Énergir n’a plus l’intention de prolonger son réseau de distribution pour desservir les régions qui n’ont pas accès au gaz naturel, a indiqué son président. Des prolongements de réseau, « on n’en faisait déjà presque plus et présentement, il n’y a rien d’important sur la table à dessin », a-t-il dit.

Le distributeur de gaz ne refusera pas de nouveaux clients, notamment dans le secteur industriel, mais il procédera « au cas par cas, avec ce qui a le plus de sens », a dit Éric Lachance.

Pour Énergir, la transition énergétique est un gros défi. Le principal est de faire des employés d’Énergir, embauchés pour vendre toujours plus de gaz, des conseillers qui orienteront les clients vers les meilleurs choix pour l’environnement.

« Le travail de nos employés aussi change, a expliqué M. Lachance à son auditoire. Nos représentants aux ventes deviendront progressivement des “agents de décarbonation” pour avoir un réel impact sur nos clients, la société et notre environnement. »

L’entreprise ne prévoit pas faire de mises à pied, mais si les ventes de gaz naturel baissent, les revenus vont éventuellement baisser et imposer une gestion plus serrée. « Les compensations d’Hydro-Québec ne remplaceront pas tout, on va avoir moins d’argent, avance Éric Lachance. On a eu de belles années de croissance, mais il faut maintenant gérer la maturité et la décroissance. »

Le distributeur de gaz prévoit se redéployer dans ses autres activités, dont le gaz naturel renouvelable et la distribution d’électricité.

Énergir a d’ailleurs l’appui de ses actionnaires, la Caisse de dépôt et placement du Québec et le Fonds de solidarité FTQ, dont les coffres sont bien remplis, pour prendre de l’expansion sur le marché américain, dans des activités liées à la transition énergétique, a fait savoir M. Lachance.

D’autres solutions existent, à moindre coût

Des groupes environnementaux qui critiquent l’entente entre Hydro-Québec et Énergir estiment que le véritable coût pour Hydro-Québec est beaucoup plus élevé que ce que disent les deux entreprises.

Selon leur calcul, la compensation que versera Hydro-Québec à Énergir est de 2,4 milliards d’ici 2050, somme à laquelle il faut ajouter un manque à gagner de 4,8 milliards en vente d’électricité pour la société d’État. Le vrai coût pour Hydro-Québec est donc de 7,2 milliards, selon la coalition qui regroupe entre autres Greenpeace Canada, Nature Québec et le Regroupement des organismes environnementaux en énergie.

D’autres moyens, beaucoup moins coûteux, peuvent être employés pour réduire les émissions québécoises, selon eux. Les technologies existent et Hydro-Québec en fait déjà la promotion « par le biais de ses filiales Hilo et EVLO et de subventions comme c’est le cas pour les accumulateurs de chaleur et les thermopompes basse température », précisent-ils.

L’entente entre Hydro-Québec et Énergir, qui se traduira par une hausse des tarifs des clients d’Hydro-Québec, doit être approuvée par la Régie de l’énergie.