Savez-vous vraiment de quoi sont faites vos charcuteries ? En analysant des produits achetés en épicerie, une chercheuse de l’Université Laval a découvert que des produits qui contenaient du bœuf dans leur liste d’ingrédients ne contenaient aucun ADN détectable de bœuf.

Les résultats de cette enquête sont présentés ce mercredi, lors d’une conférence dans le cadre du 90e congrès de l’Acfas, à Montréal.

L’étude s’est penchée sur la catégorie des produits qui déclaraient la présence de plusieurs espèces de viandes en même temps sur l’étiquette des ingrédients. Des saucisses, des plats préparés, des boulettes et des charcuteries ont été analysés grâce à la méthode PCR.

Sur les 74 échantillons déclarant la présence de bœuf, 9 ne contenaient pas d’ADN de bœuf détectable. En revanche, l’ADN d’autres espèces animales a été décelé. Dans tous les cas, il s’agissait de charcuteries.

« Ce sont possiblement des cas de fraude, des analyses immunologiques permettront de le démontrer », résume la chercheuse Gabrielle Vatin, qui est candidate au doctorat en sciences réglementaires des aliments.

Sur les 74 échantillons, 9 ne contenaient que des « traces » de bœuf, soit une détection d’ADN de bœuf se situant entre 0 % et 1 %.

Cette quantité est très négligeable. À preuve, en deçà du seuil de 1 %, la présence d’une substance peut être attribuable à une contamination croisée survenue sur des équipements de transformation comme un hachoir.

« Les produits alimentaires qui possèdent du bœuf entre 0 et 1 % et que c’est marqué comme ingrédient, comment on est censé considérer cet ingrédient comme un ajout volontaire ? », se questionne-t-elle.

« Et/ou » ?

Contrairement à l’Union européenne, les règlements canadiens n’exigent pas que les transformateurs et détaillants indiquent le pourcentage de viande que contiennent les produits préemballés.

Curieuse d’en savoir plus, la chercheuse s’est ensuite intéressée aux produits qui contenaient la mention « et/ou bœuf ». Un produit qui, par exemple, aurait dans sa liste d’ingrédients « porc et/ou bœuf » pourrait être constitué de porc, de bœuf ou à la fois de porc et de bœuf.

Or, le bœuf, une viande qui coûte plus cher, semble rarement présent. Sur les 16 échantillons analysés, 15 contenaient entre 0 % et 1 % d’ADN de bœuf détectable.

« Je ne veux pas que ça puisse induire en erreur le consommateur », a expliqué Mme Vatin au sujet de la mention « et/ou ». Elle souligne qu’une personne pourrait choisir un produit contenant du bœuf en raison de « sa plus-value » alors que le produit n’en contient que des traces.

Le projet de recherche n’est pas terminé. Les résultats n’ont pas encore fait l’objet d’une publication dans une revue savante révisée par les pairs.

Les attentes du consommateur

Dans le cadre de la deuxième phase de l’étude, qui sera menée au cours des prochains mois, la chercheuse sondera près de 400 personnes pour connaître leur avis.

Elle demandera notamment : « À quoi vous vous attentez quand vous achetez une saucisse porc et bœuf ? À quel pourcentage estimez-vous les quantités de bœuf dans le produit ? »

« J’ai hâte de savoir un petit peu les attentes des consommateurs. »

Les répondants vont-ils se « moquer » d’une présence de bœuf sous le seuil de 1 % ou au contraire seront-ils mécontents ? Cela reste à déterminer.

Chose certaine, les consommateurs espèrent davantage de transparence dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire.

« Les consommateurs s’intéressent de plus en plus à ce qu’ils mangent, ils font vraiment beaucoup attention, explique Mme Vatin. Le consommateur, pour faire attention à ce qu’il mange, il faut qu’il sache ce qu’il mange. »